Réaction au Forum de Davos

Publié le par Adriana Evangelizt

FORUM DE DAVOS

Le ministre palestinien de l'économie :

Le monde doit laisser une chance au Hamas

Par Ora Koren, Aluf Benn, Lilach Weissman, Yoav Stern,

 correspondants de Haaretz, + Agences
Haaretz, samedi 28 janvier 2006

DAVOS, Suisse — Des hauts fonctionnaires palestiniens présents au Forum Economique Mondial ont demandé instamment à Israël et à la communauté internationale de donner une chance au Hamas, indiquant qu'ils s'attendent à ce que le groupe militant change à la suite de sa victoire électorale stupéfiante en Cisjordanie et à Gaza.

"Si nous cherchons vraiment à ce que cette région soit prospère et stable, et si nous souhaitons voir un état palestinien viable, alors la communauté internationale devrait maintenir son soutien au peuple palestinien". Voici ce qu'a déclaré vendredi le Ministre palestinien de l'économie, Mazen Sinnukrot.

"La communauté internationale, et surtout l'Europe, les Etats-Unis, le Japon et les Arabes ont … soutenu notre budget, nos projets d'infrastructure, nos institutions".

Sinnukrot et deux autres Palestiniens de premier plan se sont exprimés lors d'une conférence de presse en marge de la réunion des dirigeants politiques et des milieux d'affaires mondiaux à Davos, où on leur a demandé d'envisager le scénario incroyable selon lequel le Hamas, en tant que parti dirigeant le gouvernement palestinien, revendiquerait un attentat suicide à la bombe.

"Ne présumons pas qu'ils seront au gouvernement et qu'ensuite ils iront poser des bombes en Israël", a dit Mohammed Moustafa, un haut conseiller du président palestinien Mahmoud Abbas. "Ne portons pas ce jugement".

Sinnukrot a ajouté que "même l'OLP était par le passé une organisation terroriste et qu'elle s'est assise à la table des négociations avec les dirigeants israéliens. Je pense que nous devons donner une chance au Hamas afin de voir si le Hamas d'hier est le même que le Hamas de demain".

Le Ministre des Affaires Etrangères de l'Afghanistan, Abdulhah Abdulhah,
a dit que le Hamas se trouvait dans une situation où ses actions seront scrutées de très près.

"Ils sont arrivés en position d'assumer les responsabilités et le monde attendra d'eux qu'ils agissent de manière 100 fois plus responsable que par le passé", a-t-il déclaré à l'
AP. "Comment ils contribueront à la paix et au succès de la feuille de route et à sa … conclusion heureuse : deux Etats vivant en paix l'un avec l'autre".

Sinnukrot a demandé instamment à Israël de maintenir ses liens avec l'Autorité Palestinienne malgré tout — insistant surtout sur l'union douanière et les liens économiques étroits établis par l'accord de Paris en 1994 et sous lequel Israël collecte certaines taxes pour le compte des Palestiniens.

"Israël a toujours été notre principal partenaire commercial. Je suis sûr que les Israéliens, en abordant la question avec toute leur sagesse, l'examineront dans un sens très positif — qu'ils n'essayeront pas de prendre des mesures incorrectes en matière de collecte d'impôts".

Moustafa a déclaré qu'il était attendu que Mahmoud Abbas travaille en harmonie avec le Hamas.

"Il n'y a rien de mal à ce qu'un parlement qui dispose d'une meilleure représentation ne puisse que renforcer le système et renforcer le pouvoir. Il y aura plus de coopération entre M. Abbas et le nouveau parlement".

Mounib Masri, un homme d'affaire palestinien de premier plan, a conseillé vivement aux Israéliens d'accepter la nouvelle réalité. "J'espère que nos amis israéliens ne se cacheront pas la face derrière leurs mains. La situation est ainsi, et nous devons tous vivre avec" a-t-il déclaré. "Je veux vous assurer que tout ira bien. Les Palestiniens sont déterminés et ils feront du bon boulot, sous réserve que chacun nous donne une chance".

Le Premier ministre égyptien déclare que l'élection du Hamas exprimait une exigence de changement

Le Premier ministre égyptien Ahmed Nazif a déclaré vendredi soir que l'écrasante victoire électorale du Hamas exprimait l'exigence du changement de la part des Palestiniens qui veulent des emplois, des services et une vie meilleure.

Le Ministre des Affaires Etrangères britannique, Jack Straw, a déclaré que le Hamas doit d'abord démontrer que "le transfert du pouvoir de l'élite vers la rue" produit une véritable démocratie pour les Palestiniens.

Nazif et Straw s'exprimaient, avant un dîner à huis clos, sur les questions du Moyen-Orient au Forum Economique Mondial, un événement qui affiche complet après la raclée que le Hamas a infligée au Fatah, le parti dirigeant, lors des élections législatives de mercredi dans les Territoires Palestiniens.

Le Hamas, qui a revendiqué la responsabilité de nombreux attentats-suicides en Israël et qui est considéré comme une organisation terroriste par les Etats-Unis, s'est engagé dans sa charte à la destruction d'Israël. Israël a déclaré qu'il refuserait de traiter avec tout gouvernement palestinien qui comprendrait le Hamas.

Le ministre égyptien s'exprimait sur la victoire du Hamas dans un contexte plus général, insistant pour dire que le changement est inévitable au Moyen-Orient et que "soit vous le laissez se produire, soit vous faites en sorte qu'il se produise".

Certains gouvernements - qu'il n'a pas nommés - s'occupent des besoins de leur peuple, tandis que d'autres ne le font pas "et la nécessité d'un changement vient alors du peuple - et c'est ce que nous voyons se produire autour de nous aujourd'hui".

Dans tout le Moyen-Orient, a dit Nazif, les priorités essentielles des gens sont des emplois, de meilleurs services et de meilleures conditions de vie ; et si leurs gouvernements échouent à leur apporter, "le changement politique devient inévitable".

Il a déclaré que la question qui se posait avec les élections palestiniennes est : "Sont-ils mécontents seulement de leur situation ou sont-ils mécontents de leurs dirigeants ? C'est la question à laquelle nous devons répondre".

Straw a déclaré qu'il avait vécu en fonction des résultats d'élections démocratiques toute sa vie et qu'il avait passé 18 années dans l'opposition, et qu'il est donc d'accord avec ceux qui déclarent que les électeurs ont fait le mauvais choix et commis une injustice.

"C'est lorsque vous obtenez une soi-disant mauvaise réponse [de la part des électeurs] que la fois de l'élite et des puissants en la démocratie peut vraiment être testée", a-t-il dit.

"On entend déjà des gens qui disent que ces élections longtemps retardées auraient dû être encore repoussée". Mais il a désapprouvé. "Il y a problème en ce moment dans les Territoires Occupés et c'est le problème du Hamas", a déclaré Straw.

"Mais une mauvaise réponse [à ce problème] renverrait directement à Saddam Hussein ou à un coup d'état à l'Occidentale pour renverser les résultats de l'élection, et ensuite conduirait à la loi militaire et des décennies d'insurrection et de bains de sang", a-t-il mis en garde. "Et une mauvaise approche, par-dessus tout, conduirait à la perte du leadership moral, surtout de la part de l'Occident".

Straw a déclaré que l'Occident doit maintenant faire en sorte que les élections palestiniennes fournissent "une leçon plus large de démocratie".

Le premier principe doit être "que la violence et la démocratie sont incompatibles".

Le deuxième principe est que ceux qui ont été élus tiennent les engagements de ce qu'ils ont promis aux électeurs, et cela ne peut être fait que "par des moyens pacifiques et non-violents".

Le droit d'Israël à exister est le troisième principe clé, a-t-il déclaré, et aucun gouvernement palestinien "ne peut en fait tenir ses engagements sans coopérer, sans traiter avec Israël".

" Nombreux sont ceux qui ont été surpris par les résultats, mais je suspecte que personne n'a été plus surpris que les dirigeants du Hamas eux-mêmes - étant donné que tout indiquait qu'on s'attendait à ce qu'ils fassent un bon score, mais qu'ils priaient très fort de rester dans l'opposition où ils pourraient exercer un pouvoir négatif sans assumer les responsabilités", a déclaré Straw.

À présent, ils doivent faire face au fait que les responsabilités d'un gouvernement dans toute démocratie excède le pouvoir, et "il faut attirer l'attention des dirigeants du Hamas sur le fait qu'ils doivent assumer leurs responsabilités", a-t-il ajouté.

La Ligue Arabe : Le Hamas doit reconnaître Israël

Le Hamas devra accepter l'initiative de Beyrouth, qui appelle à une reconnaissance arabe totale d'Israël, malgré sa position déclarée, a déclaré vendredi le Secrétaire Général de la Ligue Arabe, Amr Moussa, après la victoire du Hamas dans les élections législatives palestiniennes.

Moussa a ajouté que le processus diplomatique au Moyen-Orient doit suivre les directives de Beyrouth, qui comprennent un retrait total israélien des Territoires, conformément aux résolutions 242 et 338. L'initiative, approuvée par la Ligue Arabe en 2002 fut rejetée par le Premier ministre Ariel Sharon.

Moussa s'exprimait lors d'une conférence sur les résultats électoraux palestiniens qui se tenait pendant le Forum Economique Mondial de Davos, en Suisse.

Le Directeur Général du Ministère des Finances [israélien], Yossi Bachar, a déclaré lors de la même conférence, vendredi, qu'Israël pourrait cesser de transférer des fonds aux Palestiniens après la victoire du Hamas dans les élections de cette semaine.

"Nous allons faire face à des problèmes pratiques sur la manière de traiter avec des gens qui appellent à la destruction d'Israël", a déclaré Bachar. "S'ils veulent continuer à travailler avec nous, il faudra qu'ils trouvent une solution, autrement, je ne vois pas comment ils obtiendront l'argent", a-t-il ajouté.

Bachar a déclaré que le budget palestinien est basé sur les revenues des droits de douane et de la TVA collectés par Israël pour le compte des Palestiniens et sur l'aide de l'Arabie Saoudite.

L'envoyé spécial de la Banque Mondiale, James Wolfensohn, qui assure la coordination entre l'Autorité Palestinienne et les pays qui lui apportent une aide financière, a déclaré vendredi qu'il pensait que ces pays mettraient fin à leur aide à l'Autorité Palestinienne, à la suite de la victoire du Hamas, à cause du "manque de certitude et d'espoir". Il a déclaré que le problème se présenterait de lui-même dès la semaine prochaine lorsque l'Autorité Palestinienne n'aura pas d'argent pour payer les salaires de ses employés.

Des Chiites libanais de premier plan s'attendent à des pourparlers indirects entre le Hamas et Israël

Le dignitaire religieux chiite le plus important du Liban a déclaré vendredi qu'il s'attend à ce que le Hamas négocie indirectement avec Israël après la victoire éclatante du groupe militant lors des élections parlementaires palestiniennes.

Le Grand Ayatollah Mohammed Hussein Fadlallah a aussi critiqué les Etats-Unis et l'Europe pour avoir adopté la position selon laquelle le Hamas ne pourrait pas former un gouvernement palestinien à moins de laisser tomber sa revendication de détruire Israël et de renoncer à la violence.

"Nous considérons que le rejet des résultats électoraux par l'Amérique et l'Europe comme un rejet de la démocratie et du choix du peuple palestinien", a déclaré Fadlallah, qui est le chef de file religieux de 1,2 millions de Chiites libanais.

Fadlallah a loué la victoire inattendue du Hamas, ce mercredi, comme étant un vote en faveur de la lutte armée du groupe contre Israël. "Les élections palestiniennes ont produit une surprise politique : le mouvement du Hamas gagnant la majorité absolue au Conseil Législatif Palestinien", a dit Fadlallah devant quelques 5.000 fidèles dans un sermon après la prière de vendredi dans une mosquée au sud de Beyrouth. "Cela indique que le peuple palestinien a élu la résistance islamique à une position de responsabilité politique".

"Le Hamas poursuivra des négociations indirectement avec l'ennemi pour obtenir la libération", a dit Fadlallah.

Il n'a pas dit comment les discussions indirectes pourraient être conduites, mais il a dit qu'Israël pourrait les faciliter en stoppant ses attaques sur les Palestiniens en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.

Les négociations ne peuvent pas se dérouler "alors qu'Israël est en mouvement avec toute sa puissance destructrice contre le peuple palestinien" comme c'est le cas aujourd'hui, a déclaré Fadlallah.

Plus tard dans la journée, des centaines de supporters libanais et palestiniens du Hamas ont défilé à travers les rues de Sidon, la ville du Sud, dans plus de 100 voitures, pour célébrer sa victoire électorale. Ils ont agité les drapeaux verts du Hamas de même que des photos de dirigeants du Hamas, surtout celle de son fondateur, le Cheik Ahmed Yassine, qui a été assassiné par Israël il y a deux ans.

Les voitures étaient suivies par des véhicules de la police libanaise et l'on pouvait voir des soldats dans les rues pour parer à toute urgence. Le défilé s'est terminé sans incidents.

"La victoire du Hamas est une victoire pour l'ensemble du peuple palestinien et cela renforcera assurément les alternatives de la résistance, libérant la terre et permettant le retour des réfugiés", a déclaré Abou Ahmed al-Fadl, un officiel du Hamas au Sud Liban.

Ces derniers jours, le Hamas a envoyé des messages ambigus à propos de traiter avec Israël, disant que les négociations ne sont pas à l'ordre du jour mais qu'une extension du cessez-le-feu de l'année dernière est possible si Israël fait de même.

Fadlallah attribue la victoire du Hamas à "la sincérité qu'il a prouvé à travailler pour libérer la terre et le peuple en offrant des martyrs tant au niveau de sa direction que de sa base". Il se référait aux dirigeants du Hamas qui ont été tués par Israël, souvent lors d'attaques aériennes contre leurs véhicules, de même qu'aux membres plus jeunes tombés dans ce conflit.

Fadlallah était le mentor spirituel du groupe militant libanais, le Hezbollah, pendant les années 80, lorsque ce groupe fut condamné pour l'enlèvement d'Occidentaux et des attentats à la bombe contre des cibles américaines, à Beyrouth, qui tuèrent plus de 260 Américains.

Cependant, Fadlallah a pris depuis longtemps ses distances avec le Hezbollah, qui n'a jamais admis avoir tenu un rôle dans ces enlèvements et ces attentats à la bombe.

Traduit de l'anglais par Jean-François

Sources : Questions critiques

Posté par Adriana Evangelizt

Publié dans HAMAS

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