Enfants de Gaza et de Nilin : unis dans la même misère

Publié le par Adriana Evangelizt



Enfants de Gaza et de Nilin : unis dans la même misère


Ramzy Baroud

Moussa fait partie des centaines d'enfants délibérément assassinés par les soldats israéliens ces dernières années.

Ahmed Moussa était un jeune garçon palestinien âgé de 12 ans du village de Nilin en Cisjordanie, près de Ramallah. Mohamed Bahloul est un jeune garçon palestinien âgé de 12 ans et de la ville de Gaza. Le premier a été pris pour cible et tué le 29 juillet par les forces israéliennes durant une manifestation pacifique contre le mur israélien d’Apartheid. Le second attend la mort dans un hôpital délabré de Gaza.

Les rapports sur la mort de Moussa varient. Le rapport de la « Campagne contre le Mur d’Apartheid » a fait savoir que le garçon « était assis sous un arbre avec ses amis lorsqu’une jeep militaire a surgi et que les militaires lui ont tiré dessus — une balle a touché sa tête. Le garçon est mort sur le coup. »

Le communiqué de l’Agence France-Presse, le jour suivant, a confirmé la nature de la mort mais indiquait que le garçon avait été tué pendant la manifestation. Nilin, un des nombreux villages perdant des terres à cause du mur israélien — celui-ci est considéré comme illégal selon l’avis prononcé par la Cour Internationale de Justice en 2004 — est le théatre de manifestations régulières contre la confiscation et la destruction des fermes du village.

Ces manifestations font partie d’une campagne non-violente de longue haleine qui rassemble des militants pacifistes israéliens, palestiniens et internationaux.

« Moussa a voulu courir mais sa sandale a glissé après qu’il ait trébuché sur un élément du barrage, » selon un des amis de Moussa.

Le fait est qu’un jeune garçon qui devrait être à la maison pour profiter de la compagnie de sa famille et de ses amis, ou participer à une colonie de vacances, ou jouer au soleil, est maintenant mort. Il fait partie des centaines d’enfants palestiniens assassinés ces dernières années par les soldats israéliens montrant une volonté systématique et délibérée de prendre des enfants pour cible.

Essayant de tirer un sens à cette tragédie, le père n’a pu que dire : « Dieu m’avait donné mon fils Ahmed, et il me l’a repris comme martyre. »

A moins d’une heure et demie de route de Nilin, Bahloul souffre d’insuffisance rénale. Il est relié à une machine de dialyse d’aspect pitoyable dans un hôpital de Gaza. « Aljazeera.net » a rendu compte du cas de Bahloul : pendant trois mois, explique sa mère Nadia, il n’a reçu aucun médicament et aucune vitamine pour renforcer son corps malade.

« Il n’y a pas une porte à laquelle je n’ai frappé, espérant trouver des médicaments pour Mohamed, » dit-elle. Dans un endroit qui ressemble à bien des égards à un camp de concentration où un million et demi de personnes sont soumises aux conditions de vie les plus inhumaines, le cas de Bahloul est à peine une exception.

En dépit du cessez-le-feu entre le gouvernement du Hamas à Gaza et Israël qui garantit que des fusées artisanales palestiniennes ne sont plus tirées en direction des villes israéliennes situées au sud, il n’y a aucun répit pour la pauvreté et le siège à Gaza. Le chef des opérations de l’UNRWA à Gaza, John Ging, a déclaré que la situation devenait « de pire en pire » pour la population de Gaza devenue en grande partie dépendante de l’aide extérieure. Il a promis que son équipe ferait tout ce qu’elle pourra pour aider « ces pauvres gens qui continuent de devenir de plus en plus pauvres. »

L’ampleur de la catastrophe humanitaire à Gaza a déjà dépassé beaucoup de seuils et la pauvreté a rendu la plupart des Gazans dépendant d’une aide alimentaire de survie. Les hôpitaux manquent d’équipements et de médicaments et ni Israël ni l’Egypte ne permettent aux Palestiniens de Gaza souffrant de maladies représentant un danger pour la vie de voyager librement et de façon régulière. A présent même l’eau à Gaza est polluée au delà de toute solution imaginable.

Le « Christian Science Monitor » a rapporté le 21 juillet que seulement un sixième des eaux d’égout de chaque jour dans Gaza — estimées jusqu’à 120 millions de litres par jour — est entièrement traité. L’énorme quantité des eaux d’égout non traitées trouve son chemin jusqu’à la mer et s’infiltre dans les réserves en eau du territoire.

« S’il y avait un mot plus fort que ‘catastrophe’, j’emploierais ce mot, » a dit Nader Al-Khateeb, le directeur palestinien des Amis de la Terre au Moyen-Orient. La catastrophe est « le résultat de l’eau perdue dans Gaza et de l’infrastructure pour les eaux d’égout minée par les attaques [des Israéliens] et le blocus qui affecte les livraisons de carburant ».

Selon Monther Shoblak, le directeur du projet « Gaza Emergency Waste Project » financé par la banque mondiale, à cause des eaux d’égout s’infiltrant dans le sol, la couche aquifère sous Gaza, qui fournit l’eau potable et pour se laver, est maintenant tellement polluée avec des nitrates que seulement 10% de cette eau répondent aux normes de sécurité de l’Organisation Mondiale de la Santé. Dans Gaza les maladies liées à l’eau sont maintenant nombreuses.

Gaza fait l’expérience de la dévastation à tant de niveaux qu’il est impossible de trouver le moindre indicateur concernant la santé ou l’économie qui soit positif. La recherche effrénée de médicaments par la mère de Bahloul pour sauver son fils est terriblement compliquée par le fait que son mari ait perdu son travail à cause de blocus israélien et qu’il y ait d’autres bouches à nourrir. Le chômage dans Gaza monte en flèche et les enfants sont souvent obligés de manquer l’école afin de contribuer aux maigres revenus de leurs familles si pauvres. La vente du thé dans la rue avec des théières géantes transportées par des enfants souvent trop jeunes pour être inscrits à l’école est une profession de plus en plus fréquente.

Tandis que les villageois palestiniens de Cisjordanie s’opposent à des notifications d’expulsion de leurs maisons et de leurs terres pour faire place au projet du mur israélien long de 723 kilomètres (454 milles) et dont 57% sont déjà construits, les Palestiniens dans Gaza luttent pour leur simple survie. Leurs difficiles situations sont terriblement semblables. Malgré le fait que la Cisjordanie et Gaza aient été séparées par l’occupation et des politiciens égoïstes et ne manquant de rien, elles sont unies par la peine et par leur lutte commune.

Pendant ce temps un rapport publié par l’organisation Human Rights Watch dénonce le fait que le Hamas et le Fatah sont, concernant les droits de l’homme, tous les deux responsables de graves abus dont l’usage de la torture contre des membres du groupe opposé. Alors que le Hamas est régulièrement critiqué pour les violations des droits de l’homme rapportées dans Gaza et qui ont été utilisées pour justifier rétrospectivement un blocus mortel, la partie autour de Mahmoud Abbas a reçu à peine quelque réprimande.

Le rapport a aussi mis en faute « les Etats-Unis et autres donateurs qui financent l’Autorité Palestinienne du président Mahmoud Abbas et les agences de sécurité dominées par le Fatah » [...] « sans prêter l’attention voulue à leurs abus systématiques, » a rapporté Al-Bawaba depuis la Jordanie.

Des articles avec des titres tels que « des Palestiniens torturent des Palestiniens » inondent rapidement les journaux. Les membres du Hamas et du Fatah continuent à s’injurier les uns les autres et les campagnes d’arrestations et de torture se poursuivent. Le conflit a semblé un moment entièrement interne aux Palestiniens, avec Israël jouant à l’observateur innocent.

En attendant, le père de Moussa continue à implorer « la pitié de Dieu » pour l’âme de son fils. La prière et la supplication sont ses seules ressources. Et à Gaza, la mort continue à planer sur la demeure de Bahloul.

Tout cela est d’une grande cruauté, et c’est profondément inhumain.

(*) Ramzy Baroud est l’auteur de « The Second palestinian Intifada : A Chronicle of a People’s Struggle » et rédacteur en chef de « PalestineChronicle.com »

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Sources Info Palestine

Posté par Adriana Evangelizt

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