Abandonner le ghetto sioniste (II/II)

Publié le par Adriana Evangelizt

Abandonner le ghetto sioniste (II/II)


Par Abraham Burg

Suite et fin de l'interview parue dans Haaretz et sur ce site le 13 juin.

 
"La réalité israélienne n'est pas excitante. Les gens ne veulent pas l'admettre, mais Israël est dans le mur. Demandez à vos amis s'ils sont certains que leurs enfants vivront ici. Combien d'entre eux vont vous répondre oui ? Au plus 50%. En d'autres termes, l'élite israélienne a déjà quitté cet endroit. Et sans élite, il n'y a pas de nation."

Q. J'ai un compte à régler avec ce romantisme. Vous décrivez mille merveilleuses années pour la société juive allemande. Dans une large mesure, vous voyez la société allemande comme un modèle. Mais il se termine à Auschwitz, Avrum. Il mène à Auschwitz. Votre romantisme "yekke" est compréhensible et attrayant, mais il ment.

R. "Existe-t-il un romantisme bien fondé ? Votre romantisme israélien est-il fondé ?

Q. Mon israélité n'est pas romantique. Au contraire : elle est cruelle. Elle est issue du besoin de comprendre. Et vous gommez ce besoin. D'un point de vue émotionnel, vous préférez le trajet qui va de Dresde à Manhattan plutôt que de faire face au destin juif israélien.

R. "Nous ne voulons pas l'admettre, mais l'existence de la Diaspora remonte aux tous débuts de notre histoire. Abraham découvre Dieu en dehors des frontières de la Terre. Jacob a guidé sa tribu en dehors des frontières. Les tribus sont devenues un peuple en dehors des frontières. La Torah est donnée en dehors des frontières. En tant qu'Israéliens et sionistes, nous ignorons cela complètement. Nous rejetons la Diaspora.

Mais je maintiens que tout comme il y avait quelque chose d'étonnant dans la société juive allemande, en Amérique aussi ils ont créé quelque chose d'étonnant. Ils ont créé une situation dans laquelle le goy (5) peut être mon père et ma mère et mon fils et mon partenaire. Là-bas, le goy n'est pas hostile mais amical. Et en conséquence, ce qui émerge est une expérience juive d'intégration, pas de séparation. Pas de ségrégation. Je trouve que c'est ce qui manque ici. Ici, le goy est ce qu'il était dans le ghetto : agressif et hostile."

Q. Il y a réellement en vous une tendance anti-sioniste profonde. D'un point de vue émotionnel, vous êtes proche des sociétés juives allemande et américaine. Elles vous excitent, elles vous font vibrer et, par comparaison, vous trouvez l'option sioniste grossière et spirituellement pauvre. Elle n'épanouit ni le cœur ni l'âme.

R. "Oui, oui. La réalité israélienne n'est pas excitante. Les gens ne veulent pas l'admettre, mais Israël est dans le mur. Demandez à vos amis s'ils sont certains que leurs enfants vivront ici. Combien d'entre eux vont vous répondre oui ? Au plus 50%. En d'autres termes, l'élite israélienne a déjà quitté cet endroit. Et sans élite, il n'y a pas de nation."

Q. Vous êtes en train de me dire que nous étouffons, ici, par manque d'esprit.

R. "Totalement. Nous sommes déjà morts. Vous ne le savez pas encore, mais nous sommes morts. Ca ne marche plus. Ca ne marche pas."

Q. Et vous voyez dans la société juive américaine la dimension spirituelle et l'effervescence culturelle que vous ne trouvez pas ici.

R. "Certainement. Il n'y a pas d'écrits juifs importants en Israël. Il y a une littérature juive importante aux Etats-Unis. Il n'y a personne pour parler ici. La communauté religieuse à laquelle j'appartenais – je ne trouve plus aucun sens à en faire partie. La communauté laïque – je n'en fais pas partie non plus. Je n'ai personne à qui parler. Je suis assis là, avec vous, et vous non plus ne me comprenez pas. Vous êtes coincé par votre extrémisme national chauvin.

Q. Ceci n'est pas tout à fait juste. Je suis au courant de la richesse juive dont vous parlez. Mais je sais aussi que l'analyse sioniste de base était correcte. Sans Israël, une civilisation juive non orthodoxe n'a aucun avenir.

R. "Prenez l’israélité la plus pure qui soit. Moshé Dayan, par exemple. Et nous nous débarrasserons de tous les Avrum, pour lui. Une israélité totalement pure. Pas d'emmerdeurs. Pas de types veules. Rien. Etes-vous certain que ce vivre pour vivre va durer très longtemps? Prenez, par ailleurs, les “aigles”. Martin Buber, George Steiner. Vous dites que ces "aigles" éthérés n’arriveront à rien. Mais mon expérience historique me dit que ces "aigles" vont plus loin que les soldats.” (6)

Q. Vous êtes vraiment en train de préparer les outils de l'exil.

R. "Je vis avec eux depuis le jour de ma naissance. Est-ce autre chose, lorsque je dis, en priant, qu'à cause de nos péchés, nous sommes exilés de notre terre ? Dans l'histoire juive, l'existence spirituelle est éternelle et l'existence terrestre est temporaire."

Q. En ce sens, vous êtes par essence non sioniste. Parce que l'énergie nécessaire à l'établissement et au maintien de cet endroit est énorme, et vous êtes en train de dire que nous ne devons pas tout donner pour cet endroit.

R. "Il n'y a pas d'israélien total. Il y a un juif total. L'Israélien est une moitié de juif. Le judaïsme a toujours proposé des alternatives. L'erreur stratégique du sionisme a été d'annuler les alternatives. Il construit ici une entreprise dont les sections les plus importantes sont une illusion. Pensez-vous réellement qu'une sorte d'entité laïque fluctuante comme Tel Aviv, de type post-kibboutz, va continuer à exister ici ? Spirituellement, nous sommes déjà morts, Ari. Vous n'avez plus qu'un corps israélien. Si vous continuez comme ça, vous ne serez plus."

Q. L'israélité est beaucoup plus riche, Avrum. Elle a de l'énergie, de la fougue, de la diversité et de la productivité. Mais vous avez fui l'israélité. Vous avez failli à l'israélité. Vous étiez un Israélien. Vous étiez bien plus Israélien que moi. Mais vous ne l'êtes plus.

R. "Je ne le suis plus. Je pense que le "non-Israélien" n'est pas une alternative à l'existence juive globale vieille de deux mille ans dont je parle. C'est pour cela que j'ai écrit ce livre. Parce que je ne veux pas quitter ce monde en me mentant à moi-même. Je vous l'ai dit : il n'y a pas d'existence juive sans un récit. Ce n'est pas possible. Et ici, il n'y a aucun récit. Mais ce qui est encore plus grave, c'est qu'il n'y a aucune force qui fera émerger un récit de l'intérieur.

En conséquence, je vais vers le monde et vers le judaïsme. Parce que le Juif est le premier post-moderne, le Juif est le premier mondialiste."

Q. Vous êtes réellement devenu un mondialiste. Vous allez vraiment vers le monde. Vous avez maintenant un passeport français, et, comme citoyen français, vous avez voté lors des élections présidentielles françaises.

R. "J'ai déjà déclaré : je suis un citoyen du monde. Voici ma hiérarchie d'identités : citoyen du monde, puis Juif et seulement après, Israélien. Je ressens une lourde responsabilité pour la paix dans le monde. Et, à mon sens, Sarkozy est une menace pour la paix dans le monde. C'est la raison pour laquelle j'ai voté contre lui."

Q. Etes-vous français ?

R. "A bien des égards, je suis Européen. Et à mon avis, Israël fait partie de l'Europe."

Q. Mais Israël n'en fait pas partie. Pas encore. Et vous êtes un personnage public israélien qui prend part aux élections présidentielles françaises comme un français. C'est un acte qui va loin. Un acte juif pré-sioniste. Quelque chose que ni un Anglais ni un Hollandais ne ferait.

R. "C'est vrai. C'est complètement juif. J'avance vers la condition juive."

Q. Recommanderiez-vous à tous les Israéliens d'avoir un passeport étranger ?

R. "Tout ceux qui le peuvent."

Q. Mais là aussi, vous êtes en train de mettre en pièces la garantie israélienne commune. Vous jouez avec vos multiples passeports et vos multiples identités, ce que bien peu de gens peuvent faire. Vous démantelez quelque chose de très fondamental.

R. "Ca, ce sont vos craintes, Ari. Je vous suggère de ne pas avoir peur. C'est ce que je dis dans le livre. Je propose que nous arrêtions d'avoir peur.

Q. Mais vous n'êtes pas que le livre, Avrum. Vous êtes aussi la personne à l'extérieur du livre. Et il y a une contradiction entre le purisme de l'homme qui a écrit le livre et la vie politique que vous avez vécue ici.

R. "C'est une question terrible. Terrible. C'est vrai. Pendant quelques-unes de ces années, j'ai vécu dans le mensonge. Pendant de nombreuses années, je n'ai pas été moi-même. Au début de ma carrière politique, j'avais l'énergie pour lutter pour la religion et l'Etat et pour la paix. J'étais porté par le souffle de Leibowitz (feu le Professeur Yeshayahu). Ce furent des années de sincérité. Mais ensuite, pendant de longues années, j'ai été un Mapainik (le Mapai, précuseur du Parti Travailliste). J'y étais pour être quelque part. Mais je n'étais plus moi-même. J'étais un hypocrite vis-à-vis à la doctrine."

Q. Et maintenant que vous êtes libéré des contraintes politiques, vous continuez avec le Leibowitz en vous. Vous décrivez les assassinats ciblés comme des meurtres. Vous vous réjouissez que le petit-fils de votre mère ne soit pas un pilote de chasse qui tue des innocents. Vous décrivez l'occupation comme un Anschluss israélien. Un Anschluss israélien ?

R. "C'est que nous faisons ici. Que voulez-vous que je vous dise sur ce que nous faisons ici ? Que c'est de l'humanitaire ? La Croix Rouge ?

Q. Et les assassinats ciblés sont des meurtres ?

R. "Certains d'entre eux, certainement."

Q. Nous sommes en train de glisser vers les crimes de guerre ?

R. "Je n'ai pas d'autre façon de le voir. En particulier s'il n'y a pas de possibilité de dialogue. Les Israéliens sont très calmes. Un Arabe de plus, un Arabe de moins. Ya'allah, c'est parfait. Mais au bout du compte, la pile grossit. Le nombre de gens innocents est tellement important qu'on ne peut plus le maîtriser. Et après, notre explosion et leur explosion et celle du monde seront infinies. Je vois ceci arriver sous mes yeux. Je vois l'amas de corps palestiniens traverser le mur que nous avons érigé pour ne pas le voir."

Q. Et vous n'êtes pas seulement Leibowitz. Vous êtes aussi Gandhi. Vous dites que la bonne réaction à l'Holocauste n'était pas celle d'Anielewicz (Mordechai Anielewicz, commandant de la révolte du ghetto de Varsovie) mais celle de Gandhi.

R. "Je crois en la doctrine de la non violence. Je ne pense pas que croire en la non violence signifie qu'on est un jobard. Comme Yochanan ben Zakkai, qui demandait à Yavneh et à ses sages. Pas Jérusalem, pas le Temple, pas la souveraineté ; Yavneh et ses sages."

Q. Et votre approche gandhiiste a une expression politique : vous croyez qu'Israël devrait se débarrasser de ses armes nucléaires.

R. "Bien sûr, bien sûr. Le jour où la bombe sera détruite sera le jour le plus important dans l'histoire d'Israël. Ce sera le jour où nous aurons signé, avec l'autre côté, un accord tellement bon que nous n'aurons plus besoin de la bombe. Cela doit être notre ambition."

Q. Avrum, votre livre est celui d'un homme de paix. Presque celui d'un pacifiste. Comment cela se fait-il que lorsqu'un homme de paix comme vous a quitté la politique, il a essayé d'acheter au gouvernement une usine qui fabrique des pièces pour les chars ?

R. "Je suis un homme d'affaires, je m'occupe d'entreprises. En les remettant sur pied. Des privatisations. J'aime ce boulot et je le réussis. Un de mes projets principal fut les Industries Ashot, à Ashkelon, dont 40% fabriquent des armes. Mon intention était de fermer cette ligne de production et d'élargir la place d'Ashot dans l'aviation civile. Il n'y aura pas un seul jour où je serai responsable de la fabrication d'armes. J'ai vu ça comme le pari de prendre une entreprise qui fabrique des lances pour les transformer en socs de charrues."

Q. Cet arrangement pose de sérieuses questions. Il a entraîné une enquête du contrôleur de l'Etat et de la police. Mais je ne veux pas vous interroger sur l'aspect criminel parce que l'affaire est close et que vous avez été blanchi. Ce que je veux vous demander, c'est comment la première chose qu'un politicien qui s'est présenté comme un anti-Thatcher et un ennemi juré de la privatisation ait fait, après avoir quitté la politique, ce fut d'essayer de tirer d'énormes profits personnels de la privatisation.

R. "J'avais l'intention de faire la chose la plus anti-Thatcher qui soit. L'Etat se vendait mal, mais je voulais faire une bonne acquisition. L'Etat a trompé les travailleurs et je voulais garantir leurs droits. Je voulais montrer un modèle différent de partenariat entre employés et propriétaires. Je pense qu'il est injuste que l'Etat d'Israël m'ait écarté de cet arrangement. Lorsque j'ai quitté la politique, les tentations étaient grandes. J'aurais pu entrer dans tel ou tel conseil d'administration. Les gens voulaient que j'ouvre et que je ferme des portes. Mais j'ai dit non. Je suis allé vers la vieille industrie. A la périphérie. Maintenant, je produis du maïs à Hatzor Haglilit. Je ne suis pas installé à Kiryat Atidim (une zone industrielle de haute technologie). Je ne suis pas installé dans les endroits en pointe. Je mouille ma chemise tous les mois pour payer mes 600 employés. Leurs salaires."

Q. Il n'est pas tout à fait exact de dire que vous ayez décidé de ne pas ouvrir ou fermer des portes. Dans votre coentreprise avec l'homme d'affaires David Appel, vous étiez supposé ouvrir des portes de manière à ce qu'il puisse réincarner le projet touristique "Ile grecque" au sud de l'Italie.

R. "Ce projet n'a pas abouti. Même pas une opportunité de business. Mais si quelque chose en était sorti, alors quoi ? Parce que 20 personnes n'aiment pas David, il est inacceptable ? Parce que des choses terribles ont été dites à son sujet dans le système judiciaire, mais rien n'a été prouvé ? C'est une violence que je ne peux tolérer. C'est tout simplement une pratique de bourreau. L'israélité comme bourreau, et nous l'aimons vraiment – ça fait vendre les journaux."

Q. Les allégations contre vous au sujet des Industries Ashot et de David Appel font partie de l'approche de bourreau israélienne ?

R. "Ici, c'est la société de la potence. D'abord on vous pend et au moment de votre dernier souffle, on vous demande pourquoi c'est le dernier. Pourquoi il quitte votre corps. Nous vivons actuellement dans l'équivalent des années 1950 en Amérique. Dans une ère maccarthiste. L'attaque de la corruption est du MacCarthysme. Il est important que nous fixions des limites. Par le passé, nous chapardions dans les poulaillers, et aujourd'hui c'est impossible. Nous demandions aux filles, Quand vous dites non, qu'est-ce que vous voulez dire ? et aujourd'hui, le harcèlement sexuel est interdit. Mais la manière dont c'est fait – le style, la vulgarité, la démagogie, la superficialité. L'incapacité de se défendre correctement de ceux qui sont attaqués."

Q. Vous connaissez bien l'art de l'attaque défensive. Par exemple, Salai Meridor (ancien président de l'Agence juive) décide qu'il n'y a aucune justification pour que lui ou vous bénéficiez du privilège infondé d'une voiture avec chauffeur à vie, et vous le poursuivez en justice pour vous battre de toutes vos forces pour ce privilège.

R. "Comme ancien président de l'Agence juive, j'ai droit à une retraite, comme vous avez droit à une retraite. Un jour, elle disparaît. Terminé. Imaginez qu'une partie de votre retraite est de recevoir gratuitement Haaretz, et un jour, Amos Schocken (le propriétaire du journal) vous l'enlève. Vous ne vous battriez pas ? Vous n'iriez pas au syndicat des travailleurs ? N'importe qui a le droit de se battre quand on lui prend quelque chose – seul, Avrum n'a pas ce droit. Pourquoi ? Parce que. Toute cette histoire est tellement dérisoire en terme d'argent qu'elle n'existe même pas. Mais au niveau du principe, ça m'a mis hors de moi."

Q. Nous parlons d'environ 200.000 shekels (36.000 euros). Et de votre comportement, que le juge a trouvé honteux. Et sur le fait que même si vous parlez haut et fort de morale, vous ne voyez pas de faille morale dans le fait que 10 ans après avoir quitté l'Agence juive, vous effectuiez vos déplacements d'affaire à travers tout le pays dans une voiture avec chauffeur de l'Agence juive. Et par-dessus le marché, vous êtes aujourd'hui totalement étranger à tout ce que représente l'Agence juive.

R. "J'aurais des choses à dire sur ce que le juge a déclaré. Mais je ne contre-attaquerai pas. Je n'utiliserai pas la violence contre la violence. Nous parlons des droits fondamentaux des personnes. Des droits à une retraite."

Q. Est-ce que ça valait le coup ? Ce qui restera gravé dans la mémoire des gens, c'est que Salai Meridor était juste et modeste, et Avrum Burg un hédoniste qui a convoité des avantages.

R. "Ce qui reste de tout ça, c'est que je suis en paix avec moi-même. Tout ceux qui se sentent à l'aise avec la violence secrète ou les coups de poignard dans le dos ou avec le fait d'être un Sicaire (nom donné aux Juifs du Second Temple qui se servaient d'une épée, "sicarius", pour se débarrasser des collaborateurs avec Rome) dévoilé ou masqué – tant mieux pour eux. Parfait. Je n'ai pas l'intention de donner des leçons au monde. Pour moi, ce qui est important, c'est d'être en harmonie avec moi-même.

Q. Mais il y a un point d'interrogation qui vous accompagne depuis longtemps. Votre discours est impressionnant. Non seulement d'un point de vue de l'expression, mais d'un point de vue de la morale. Et maintenant, vous avez écrit un livre qui n'est que morale. Mais votre activité dans le monde est différente. Dans la vie politique, vous étiez intelligent, prudent, comme un serpent, et dans le monde des affaires aussi, vous êtes loin d'être un saint. La disparité entre votre langage et vos actes est dérangeante.

R. "La disparité est dans les yeux de celui qui regarde. Je ne me demande pas comment Ari Shavit me voit. Il y a longtemps que je me moque de ce qu'on pense de moi. Je vis dans un monde dans lequel ce qui m'importe, c'est ce que je pense moi de moi-même. Pendant de nombreuses années, j'ai vécu dans la crainte de ce que les gens pourraient dire. Ca m'a emmené dans les mauvais endroits. Dans des endroits où il y avait un énorme fossé entre ce que j'étais à l'intérieur et à l'extérieur. Aujourd'hui, je vis avec ma vérité."

Q. Les choses sont peut-être liées. Vous êtes réellement un homme de paix qui rejette la force brute israélienne, son militarisme, son nationalisme. Mais quand vous vous reconnectez au Juif, vous vous reliez non seulement au Juif spirituel, mais aussi au Juif de l'argent.

R. "C'est vrai. La vie, ce n'est pas seulement d'être un pionnier avec un sarcloir et un combattant audacieux à la Porte du Lion (une des portes de Jérusalem Est). La vie, c'est aussi d'être un marchand à Varsovie. Cela fait, sans aucun doute, une vie plus riche."

Q. Pourtant, vous n'en avez pas terminé avec la politique. Vous êtes un ami proche du Premier Ministre Olmert. Continuez-vous à le soutenir, même après la Seconde Guerre du Liban ?

R. "L'histoire d'Ehud Olmert est une véritable tragédie. De toutes les hommes de sa génération (il est légèrement plus âgé que moi), il est celui qui a le plus de talent. Le plus d'expérience. Il y a beaucoup d'affection entre nous. Je l'aime beaucoup. Il est l'une des personnes les plus humaines, les plus morales en ce qui concerne les relations entre les gens, et dans ses relations avec sa famille. Mais sa capacité à traduire en pratique ce qu'il est a été impossible à cause de la déclaration de la guerre. La notion bushienne que la guerre est la première option est une faute qui déteint sur toutes les autres qualités essentielles d'Olmert. Je prie pour qu'il corrige ceci par une grande action politique. Le Hamas ou la Syrie ou l'Initiative saoudienne. Je lui demande de ne pas s'entêter dans l'erreur. Il est toujours possible qu'un grand bienfait sorte d'une abérration."

Q. Qui soutenez-vous aux primaires du Parti Travailliste ?

R. "Barak".

Q. Pourquoi ?

R. "Il a déjà prouvé une fois qu'il est prêt à aller au-delà du Rubicon israélien. Et il y aura d'autres Rubicons à traverser ici. Sa capacité à le faire est pour moi une chose très importante."

Q. Voulez-vous revenir à la politique ?

R. "C'est une question ouverte. C'est seulement en 2010 qu'une nouvelle ère politique débutera en Israël. Quand la génération Olmert-Barak-Bibi (Netanyahu) sera partie, ce sera le tour d'une nouvelle génération qui viendra de l'économie, de l'université, des arts. Il y aura peut-être alors une place pour moi."

Q. Une place de Premier Ministre ?

R. "J'ai eu une fois très envie de devenir Premier Ministre. Ca m'enflammait. Je ne savais pas ce que je voulais y faire, mais je voulais terriblement y être. Maintenant, je dis que j'ai beaucoup de marathons à courir avant que cela n'arrive."

Q. Mais vous êtes dans un marathon ?

R. "Toute ma vie."

Notes de lecture :

(5) Mot hébreu utilisé pour se référer aux personnes non juives.

(6) Voici la version anglaise de ce paragraphe, difficile à traduire avec exactitude (ndt) : "Take the purest Israeliness there is. Moshe Dayan, for example. And we will shed all the Avrums from him. Totally immaculate Israeliness. No nudniks. No effete types. Nothing. Are you sure that this living-in-order-to-live will endure? Take on the other hand the 'kites.' Martin Buber, George Steiner. You say that these [ethereal] kites will not get anywhere. But my historical experience tells me that these kites get farther than the troopers."

Sources Contre Info

Posté par Adriana Evangelizt

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