"Chroniques de la haine ordinaire"
"Chroniques de la haine ordinaire"
Par ISM
Quelques jours de la vie "normale" des Palestiniens à Tel Rumeida, confrontés aux colons juifs illégaux.
La crainte des colons oblige les Palestiniens à demander à être accompagnés
Hier samedi, vers 12h30, trois militants des Droits de l'Homme patrouillaient à travers l'oliveraie lorsqu'ils découvrirent un groupe de soldats qui se baignaient dans le puits d'Abraham, situé près d'une maison palestinienne. Ils observaient les soldats lorsqu'une Palestinienne et son jeune fils sont apparus à la porte de leur maison. Elle a demandé aux militants de les accompagner jusqu'au checkpoint de Shuhada Street. Elle leur a expliqué que parce que c'était shabbat, en principe elle ne sortait pas de chez elle, parce qu'elle avait peur des colons, mais elle avait une course importante à faire.
Les militants l'ont accompagné jusqu'au checkpoint sans incident et la Palestinienne et son fils ont poursuivi leur route.
Les militants ont repris Shuhada Street vers la colonie Beit Hadassah, lorsque une Palestinienne les a appelés depuis sa fenêtre et leur a proposé de venir boire un verre d'eau. Cette femme, qui a entre 50 et 60 ans, leur a dit que le matin, à 4h, les colons israéliens ont attaqué sa femme et ont tenté d'entrer de force. Elle a raconté que pendant une dizaine de minutes, ils ont jeté des pierres sur sa maison et ont essayé d'enfoncer la porte mais ils n'y sont pas arrivés. Elle a expliqué qu'elle était seule chez elle à ce moment là, avec son petit-fils de 5 ans. Elle a leur ensuite montré comment depuis le toit de Beit Hadassah, les colons jetaient souvent des pierres sur sa maison et sur celle de ses voisins, la nuit.
Lorsque les militants sont revenus dans l'oliveraie, ils ont rencontré une autre jeune femme qui elle aussi a demandé qu'ils l'accompagnent au checkpoint. Les militants ont bien sûr accepté et lui ont demandé si elle avait vu des colons dans l'oliveraie, et elle a répondu que oui, et que parce que c'était Shabbat, elle avait peur de se faire attaquer. Les militants l'ont accompagné jusqu'à la rue, et là elle les a remercié, leur disant qu'elle pouvait faire seule le petit bout de rue qui restait jusqu'au checkpoint.
Des soldats nus
Lorsqu'ils patrouillent dans l'oliveraie de Tel Rumeida, il est habituel de voir les colons se baigner dans le puit Ibrahimi, qu'ils considèrent comme un lieu saint. Le puit est situé à l'intérieur de l'oliveraie tout à côté d'une maison palestinienne, et à côté d'un chemin que les Palestiniens, hommes et femmes, empruntent fréquemment. Le samedi 23 juin, donc, un jour de Shabbat très chaud, un groupe de militants sont passés près du puit Ibrahimi et ont vu un grand nombre de soldats en et hors service se baigner dans le puit. Ceci ne constitue pas en soi un problème, sauf que certains des soldats étaient complètement nus, à la vue des maisons palestiniennes, lorsqu'ils se changeaient pour mettre leurs maillots de bain, en mépris absolu de la culture musulmane et du sens le plus basique de la correction dans un lieu et un environnement culturellement sensible.
Des enfants détenus pour possession d'un couteau à beurre
Le lundi 18 juin, vers 14h45, deux internationaux descendaient à pied la colline, depuis l'oliveraie, pour remonter sur Tel Rumeida, lorsque les enfants palestiniens du quartier leur dirent que des garçons avaient des problèmes avec la police, en bas de la rue. Une fois arrivés, ils trouvèrent un groupe d'environ 10 palestiniens, des jeunes et des adultes, qui se tenaient autour de la jeep de la police. Les militants du TIPH (Temporary International Presence in Hebron) était là également. Un policier israélien parlait à deux jeunes palestiniens d'environ 16 ans, le père de l'un d'entre eux était là. Il était très en colère contre son fils, il lui criait dessus et, en même temps, essayait de convaincre le policier de relâcher son fils. Mais le policier a dit aux deux garçons de monter dans la jeep, et il en a fermé les portes.
Lorsque les militants ont parlé au policier pour lui demander ce qui se passait, celui-ci a répondu : "Je n'ai pas à vous parler" et "Je n'ai rien à vous dire". A ce moment là, l'autre militant a appelé l'un des frères du jeune palestinien, qui est lui aussi militant des droits de l'homme.
Celui-ci est arrivé tout de suite et a dit à la police qu'il voulait aller au poste de police avec son jeune frère et avec l'autre garçon. La police a alors emmené les deux jeunes garçons et le palestinien militant des droits de l'homme, au poste de police de Kiryat Arba.
Pendant ce temps, les militants de TIPH ont pu apprendre ce qui s'était passé.
Les garçons marchaient lorsqu'ils aperçurent un long câble électrique sur un tas de gravas. Ils l'ont coupé avec un petit couteau et ont commencé à le traîner vers la section d'Hébron sous contrôle palestinien, pour le vendre. Un colon, qui les avait vu faire depuis le cimetière juif, a appelé la police et un soldat qui était là pour leur demander d'intervenir. Apparemment, le colon a déclaré que les enfants avaient fait des gestes menaçants avec le petit couteau dont ils se servaient pour couper le câble, bien que ce soit rien de plus qu'un couteau à beurre.
Le soldat a arrêté les garçons et la police, qui est arrivée aussitôt, a commencé immédiatement à les interroger et à leur dire qu'ils allaient être emmenés à Kyriat Arba. Ils sont revenus de là une heure après, avec le militant, frère de l'un d'eux. Ils ont dit aux policiers que le câble n'appartenait à personne, et qu'ils n'avaient jamais menacé le colon avec le couteau. Le colon leur avait crié dessus mais ils l'avaient ignoré parce qu'ils voulaient le câble. Ils ont été relâchés parce qu'il était évident que le câble était un détritus et n'appartenait à personne, et que le couteau ne pouvait à l'évidence blesser personne.
Harcèlement des colons sur les enfants
Deux frères palestiniens jouaient au football sur un petit terrain près de leur maison, lorsque deux colons adultes se sont approchés d'eux d'une manière très agressive. De peur, les gamins se sont enfuis se cacher mais ont oublié le ballon derrière eux. De l'endroit où ils étaient cachés, ils ont pu voir les colons crever le ballon à coup de couteaux, le détruire, et ruiner le jeu des enfants.
Ces agressions et harcèlements contre les enfants montrent la bataille permanente que doivent mener les Palestiniens, qui désirent vivre en paix. Le harcèlement et l'intimidation sont dirigés vers tous les membres de la communauté, y compris des enfants sans défense qui devraient au contraire être protégés.
Les maisons des Palestiniens et des militants internationaux attaquées à coup de pierre
Le mercredi 21 à 22h50, un groupe de militants internationaux était assis, dans leur appartement, lorsqu'ils ont été soudain attaqués à coup de pierres jetées sur la façade de l'immeuble. L'attaque a été brève, elle n'a duré que quelques secondes, mais ils ont retrouvé 4 pierres à l'intérieur de l'appartement.
Il y a une semaine, des pierres avaient été jetées sur la maison à la même heure, apparemment lancées par les colons israéliens de la colonie de Tel Rumeida.
Deux militants internationaux sont descendus dans la rue pour voir si des colons étaient là, mais ils n'ont vu personne. Ils ont continué jusqu'à une maison palestinienne, proche de la colonie qui avait été elle aussi attaquée à coup de pierres. Lorsqu'ils sont arrivés, ils ont trouvé la famille réveillée. Le chef de famille, Hasshem Al-Azzah, leur a dit que sa maison avait été attaquée par les colons, au même moment que celle des internationaux. Hasshem a dit qu'il avait vu un colon s'enfuir en courant. Il a raconté avoir vu récemment des colons, sur le toit de la colonie, avec une fronde.
Une demi-heure après que les internationaux aient quitté la maison Al-Azzah, vers 23h40, trois nouvelles pierres ont été lancées sur le toit de leur appartement.
Tentative de destruction des oliviers
Le vendredi 22, deux militants ont été alertés par un feu, sur une partie de l'oliveraie. La parcelle fait à peu près un hectare et appartient à une Palestinienne du quartier, Ferial Abu Haikal et à son mari.
Une équipe de pompiers palestiniens s'est occupée de l'incendie, alors qu'une demi-douzaine de soldats israéliens assistait à la scène.
Lorsque les internationaux sont arrivés, vers 12h15, le feu était presque entièrement éteint, mais il y avait encore quelques flammes et beaucoup de fumée. Les arbres n'ont pas semblé être trop endommagés, mais toute la zone n'était plus qu'un tapis noir d'herbe brûlée et au moins trois arbres ont subi de graves dommages.
Vers 12h30, les soldats israéliens ont demandé aux militants de quitter l'endroit, ce qu'ils ont fait mais en restant assez près pour pouvoir voir ce qui se passait.
Ils ont discuté avec un cousin de la propriétaire de la parcelle. Il a raconté qu'il y a 4 ans, les colons de Tel Rumeida y avaient déjà mis le feu, comme ils ont mis le feu à des oliviers très vieux, qui ont une valeur toute particulière pour les Palestiniens.
Pour l'instant, on ne connaît pas la raison de l'incendie, mais il y a une vidéo, filmée par la famille Abu-Heckel, où l'on voit des colons israéliens se tenir devant le feu au moment où il a commencé. D'après les soldats israéliens, c'est le soleil qui est la cause de l'incendie.
Un peu plus tard, vers 15h, un groupe d'internationaux faisait un tour dans l'oliveraie, lorsqu'ils ont découvert qu'un arbre était toujours en feu. Ils ont appelé les soldats pour qu'ils l'éteignent, mais lorsqu'ils sont arrivés, ils ont demandé aux internationaux de partir parce que c'était trop dangereux. Deux militants ont alors couru vers l'appartement pour prendre des bouteilles d'eau, mais lorsqu'ils sont revenus, les pompiers palestiniens étaient là avec une lance à incendie. Les internationaux ont aidé les pompiers comme ils ont pu. Deux arbres sur les trois sont très abîmés.
En discutant avec Jamil Abu Hekel, il a confirmé qu'il était en mesure de filmer la terre de sa famille. Cette terre est partagée entre 6 membres de la famille, et que la parcelle brûlée l'a été chaque année depuis au moins 5 ou 6 ans. Avant, il y avait des vignes, mais elles ont été complètement incendiées il y a 10 ans.
L'un des arbres brûlés a plus de cent ans, il a été incendié de nombreuses fois, mais a toujours réussi à survivre.
Le coût de la terre palestinienne est évalué en fonction du nombre d'oliviers plantés. Mais ceci ne prend pas en compte l'attachement sentimental et émotionnel de beaucoup de Palestiniens vis-à-vis des oliviers, partie de leur héritage culturel et de leur histoire.
Incendier ces arbres n'attaque pas seulement la capacité financière des Palestiniens dans le secteur, mais aussi leur culture et leur histoire.
Sources ISM
Posté par Adriana Evangelizt