« Jérusalem capitale d’Israël » : une provocation ratée

Publié le par Adriana Evangelizt

« Jérusalem capitale d’Israël » : une provocation ratée

par Juan Gelman

Traduit par Traduit par Gérard Jugant et révisé par Fausto Giudice


Un Ehud Olmert harcelé par les critiques sur sa conduite de la guerre contre le Hezbollah et poursuivi pour son intervention dans des opérations bancaires douteuses quand il était ministre de l'Économie d'Israël, a voulu fêter en grand le 40ème anniversaire du «Jour de Jérusalem », à savoir de l'annexion arbitraire de Jérusalem-Est, la zone arabe de la ville. Cela s'appelle « réunification » en langage officiel, et le Premier ministre israélien a insisté le dimanche 13 mai sur le fait qu'elle doit être la capitale du pays, exprimant sa confiance en une reconnaissance par le monde entier et invitant les ambassadeurs étrangers – qui siègent à Tel Aviv – à la cérémonie de célébration qui eut lieu le jour suivant à la Knesset, le Parlement israélien. Y assistèrent seulement les ambassadeurs de Géorgie, du Nigeria, du Cameroun, d'Éthiopie, de Côte d'Ivoire, du Congo et du Honduras. Ceux des USA, de l'Union Européenne et des autres pays ayant une représentation diplomatique en Israël n'y ont pas assisté (Ha'aretz, 15-5-07). L'affront a été retentissant.


Un diplomate allemand - l'Allemagne exerce la présidence tournante de l'Union Européenne-a expliqué au nom de ses 27 États membres : « Nous ne reconnaissons pas l'annexion israélienne de Jérusalem-Est. Nous croyons que le futur de Jérusalem doit être le résultat de négociations entre Israël et les Palestiniens » (The Independent, 14-5-07). Il est évident que les dires et actes d'Olmert manifestent la volonté d'imposer de facto la souveraineté israélienne à tout Jérusalem. Son cabinet a approuvé le transfert de plus de bureaux gouvernementaux à la ville, comme si la question était résolue et qu'il ne s'agissait pas d'un sujet en suspens, qui doit faire l'objet d'un règlement pacifique éventuel avec l'Autorité Palestinienne, pour laquelle Jérusalem-Est doit être la capitale de son futur État : sa population et son histoire le dictent.

Les gouvernements de Tel Aviv ont toujours considéré Jérusalem comme une priorité absolue depuis qu'Israël a annexé l'est de la ville le 16 mai 1967. Ils confisquèrent des terres et affectèrent d'énormes ressources humaines et financières à renforcer la présence israélienne et à garantir la sécurité de ses résidents. Ceux de Jérusalem-Ouest, bien sûr. Qui parcourt la zone arabe trouve des logements en ruine, la pauvreté et le chômage. « C'est la conséquence de 40 années de discrimination délibérée. Dans la pratique, plus de 30% de la population de Jérusalem reçoit seulement (pour les services publics) 10% du budget de la ville » (Ha'aretz, 16-5-07). Un éditorial du quotidien israélien Ha'aretz rapporte d'autres données significatives sur ces Jérusalémites de seconde classe.

Aucun enfant vivant dans les nouveaux quartiers pour Israéliens ne reste à la maison par manque d'écoles. Dans la population arabe, 15.000 enfants ne peuvent apprendre à lire et à écrire parce qu'il manque 1300 salles de classes. « Jérusalem-Est abrite 75,8% des enfants pauvres de la ville et 62% des familles vivent sous le seuil de pauvreté ». Ainsi est la Jérusalem « réunifiée », qu'Israël a séparé de Cisjordanie par un mur. Le Mur de Berlin édifié par l'URSS méritait le nom de « mur de la honte ». Celui que construit Tel Aviv fragmente et enferme les communautés palestiniennes, exproprie de fait les territoires palestiniens où se sont installées des implantations illégales de colons et une campagne internationale de protestation le qualifie de « Mur de l'apartheid ». Pour John Dugard, renommé juriste sud-africain et rapporteur du Conseil des Droits de l'Homme des Nations Unies sur la situation des territoires palestiniens occupés, le régime qui y règne est plus complexe.

Dugard rappelle dans son rapport annuel que l'ONU a identifié le colonialisme, l'apartheid et l'occupation étrangère comme ennemis des droits humains et que « l'occupation israélienne de la Rive Gauche, de Gaza et de Jérusalem-Est réunit des éléments de ces trois régimes, ce qui fait des territoires palestiniens occupés un sujet particulier de préoccupation pour la communauté internationale » (www.unhchr.org, 23-2-07). Il signale que la Cour Internationale de Justice a confirmé que Jérusalem-Est et la Rive Occidentale du Jourdain étaient soumis à l'occupation israélienne et ajoute qu'il « n'est pas possible d'invoquer sérieusement, comme a tenté de le faire Israël, qu'il a cessé d'occuper Gaza depuis août 2005 quand il a retiré ses colons et ses troupes ». Il souligne que même avant l'opération « Pluie d'été » de 2006, en représailles à la capture d'un soldat israélien, Israël a contrôlé le territoire par terre, mer et air. Depuis cette opération, ajoute Dugard, « il a exercé son autorité militaire au moyen d'incursions et de bombardements qui clairement correspondent à une occupation ».

Une enquête que le Centre pour des Campagnes contre le Racisme a mené en décembre 2006 montre qu'une bonne partie de la société israélienne accompagne les politiques discriminatoires du gouvernement (www.jewishvirtuallibrery.org, 2007) :

50% estime qu'Israël doit encourager l'émigration des Arabes; 50% n'accepterait pas un travail avec pour chef un Arabe; 50% soutient que les Israéliens juifs doivent avoir plus des droits économiques que les Israéliens arabes; 50% éprouvent de la peur quand ils entendent parler arabe dans les rues d'Israël et 30% de la haine; 40% des Israéliens juifs pensent qu'il faut priver les Israéliens arabes de leur droit de vote, etc.

Le vendredi 11 mai, des membres du mouvement israélien La Paix Maintenant, le courant pacifiste le plus important du pays, ont tenu un meeting au cours duquel ils ont célébré le « Jour de Jérusalem » de manière très différente de l'officiel : ils ont exigé la fin de l'occupation des territoires palestiniens et se sont prononcés pour une Jérusalem en paix. Honneur à eux, à tous ceux qui marchent contre le courant, engagés dans une cause juste.

Sources Tlaxcala

Posté par Adriana Evangelizt

Publié dans JERUSALEM

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