J'ai vingt ans mais je vis à Gaza...

Publié le par Adriana Evangelizt



J'ai vingt ans mais je vis à Gaza...


(de notre correspondante à Gaza)

"Les examens vont bientôt prendre fin. Etudiants, écoliers de la bande de Gaza vont être diplômés d'ici quinze jours. Mabrouk et après ? La jeunesse palestinienne de Gaza se trouve incontestablement dans une impasse : embargo, chômage, enfermement, bombardements.... La déprime envahie les pensées, les jeunes n'ont pas de perspectives, pas d'avenir."

Les examens vont bientôt prendre fin. Etudiants, écoliers de la bande de Gaza vont être diplômés d’ici quinze jours. Mabrouk et après ? La jeunesse palestinienne de Gaza se trouve incontestablement dans une impasse : embargo, chômage, enfermement, bombardements…. La déprime envahie les pensées, les jeunes n’ont pas de perspectives, pas d’avenir.

Les discussions se ressemblent, les questions se répètent : « Qu’allons nous faire, ce n’est pas parce que j’ai obtenu une licence que je vais pouvoir trouver du travail. Chez moi, plus personne n’a de travail. Tous mes frères et sœurs ont fait des études, et aucun d’entre eux n’a trouvé de travail. Vous pensez que, moi, j’en trouverai ? » me confie Muhammed, vingt trois ans.

L’ennui.

Les jeunes tournent en rond. Tout est routine, les jours passent et rien ne change. On répète les mêmes gestes, on discute des mêmes sujets… La déprime touche tout le monde, sans distinction. La sensation d’étouffement est grande. La jeunesse est emprisonnée, mise au pied du mur. Les jeunes n’osent même plus parler des projets d’avenir. Auparavant, cela remontait le moral, ils pouvaient au moins rêver. Mais même le rêve les a quitté… le rêve n’est plus à leur portée. Il n’y pas de travail, tout le monde reste chez soi. Il n’y a plus d’essence, plus de gaz, on ne bouge plus de son quartier.

Alors, partir ?

Alors pourquoi rester se demandent certains ? Pourquoi ne pas partir vers des horizons meilleurs ? Shaima, étudiante, répond : « Tant que les frontières seront fermées, je ne préfère pas y penser, je ne veux pas rêver pour rien », et elle ajoute : « Partir mais pour aller où ? les pays arabes, et l’occident nous veulent pas de nous ». Certains refusent de partir de la bande de Gaza. C’est l’avis de Hosni, vingt quatre ans, pour qui partir est un signe de lâcheté. « Il faut que les jeunes restent ici, pour construire le pays, si nous partons qui restera ? Qui oeuvrera pour la libération de la Palestine, ma place est ici et pas ailleurs. » Asma’a, étudiante dans le même département que Hosni lui rétorque que ceux qui partent ne sont pas nécessairement des traîtres, que partir d’ici, c’est pour elle la volonté de vivre : « Ici, je suis enfermée, je le vis très mal, je n’arrive pas à me concentrer sur mes études, à la maison on ne parle que des problèmes, de la bouteille de gaz qui vient de finir, de l’argent qui ne rentre pas, des coupures d’électricité….Je n’en peux plus, je veux partir ».

Sans papiers dans son pays….

Mais Asma’a sait que même si les frontières viennent à ouvrir elle ne pourra pas sortir, car elle est sans papiers. Asma, comme Islam, Hadil, Hosni, et bien d’autres encore n’ont pas de carte d’identité palestinienne, qui n’est délivrée uniquement que par les autorités israéliennes. Asma’a est arrivée d’Algérie il y a deux ans et demi. Tous ses papiers ont été confisqués par les militaires égyptiens postés au passage de Rafah. Depuis ce jour elle ne possède aucun documents lui permettant de voyager à l’extérieur de Gaza.

Islam attend depuis quatorze ans sa carte d’identité, en vain, il ne l’a toujours pas obtenu. Islam est convaincu qu’il ne pourra jamais sortir et qu’il ne pourra jamais poursuivre ses études en France. Zoheir, trente ans et père d’un petit garçon, a reçu sa carte d’identité après avoir déposé sa demande auprès des israéliens il y a vingt ans. « Alors, tu es heureux ? lui demande un de ses amis. « Oui, un peu, j’ai ressenti une certaine joie sur le moment, mais elle s’est vite dissipée quand j’ai commencé à penser aux frontières. »

Creuser pour lutter contre la fatalité et l’ennui.

Mutaz, diplômé en sciences politiques, n’a pas les moyens financiers de poursuivre ses études en master. Les frais d’inscription sont trop élevés. Mutaz, était au chômage il y a encore un mois. Depuis, il a trouvé un travail, un drôle de travail…. il creuse des tunnels : « C’est mieux que rien », nous dit-il. Mutaz est posté à Rafah et creuse nuit et jour : « Il y a deux ans, si on m’avait dit que j’en serais arrivé là, je ne l’aurais pas cru un seul instant ». Il est arrivé au fond du trou, et n’a pas encore vu le bout du tunnel.

Eman Alhaj

Sources
CCIPPP

Posté par Adriana Evangelizt

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Publié dans LE MARTYRE DE GAZA

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