La route de Ramallah vers Jérusalem

Publié le par Adriana Evangelizt

La route de Ramallah vers Jérusalem :

illustration des tractations israélo-palestiniennes

par Benjamin Barthes

C'est pour l'instant le résultat le plus tangible du rapprochement israélo-palestinien en cours, pour lequel la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice, en visite dans la région, déploie beaucoup d'énergie. Les travaux de réfection de la route Ramallah-Qalandiya, du nom du barrage militaire qui filtre l'accès à Jérusalem, ont enfin commencé.

D'ici quelques semaines, cet axe symbolique qui relie les deux capitales palestiniennes, celle de fait et celle de coeur, sera débarrassé des nids de poule béants dont il est jalonné. Un chantier qui s'apparente à une véritable percée diplomatique tant les négociations sur ce sujet en apparence bénin ont été longues et ardues.

Pendant plus de dix ans, arguant de problèmes sécuritaires et surtout du fait que la zone est située à l'intérieur de Jérusalem qu'il considère comme sa capitale exclusive, le gouvernement israélien y a interdit l'entrée du moindre bulldozer palestinien.

"La dernière réparation de cette route, qui est l'épine dorsale de la Cisjordanie, datait de 1967, raconte Mohammed Shtayyeh, le directeur du Conseil pour la reconstruction et le développement, le bras armé de l'Autorité palestinienne en matière de grands travaux. Dès 1995, nous avons dressé des plans de réhabilitation et les donateurs étrangers ont débloqué de l'argent. Mais du fait de l'intransigeance israélienne, nos projets ont été à chaque fois gelés."

Avec le temps, la pluie, les replâtrages hâtifs et le ballet des tanks israéliens, le bitume se crevasse et se gondole, transformant la route Ramallah-Qalandiya en une piste de rodéo sur laquelle des milliers de voitures tombent en panne chaque année. "Chaque Palestinien a une histoire personnelle avec cette route, dit Mohammed Shtayyeh. Moi-même, j'y ai cassé mon moteur un jour où il avait tellement plu que l'on ne voyait plus les trous." Les nerfs des chauffeurs de "services", ces taxis collectifs qui font la navette entre le centre-ville et le check-point, sont mis à rude épreuve. "On est obligé de changer nos pneus tous les six mois, explique l'un d'eux, nommé Youssef. Les amortisseurs cassent sans arrêt. Les passagers se cognent la tête contre les vitres. L'hiver, il y a un endroit qui est tellement inondé qu'on l'appelle entre nous la piscine."

Sourcilleuse sur les questions de souveraineté, la municipalité de Jérusalem l'est beaucoup moins en ce qui concerne l'entretien des infrastructures publiques dans les quartiers arabes. Jusqu'alors, elle n'avait pas consenti à rénover cette route qu'aucun Israélien n'emprunte. "Nous sommes allés devant le tribunal et nous avons gagné mais cela n'a servi à rien, raconte Ali Barakat, le chef du village de Kfur Akab, un quartier de Jérusalem-Est riverain de la route. Même la Cour international de justice de La Haye n'aurait pas pu faire entendre raison à la mairie."

Contactés par Le Monde, ni la municipalité de Jérusalem ni le bureau du premier ministre n'ont jugé bon d'expliquer le retard pris par les travaux.

En 2006, à la suite de pressions américaines, et parce que le mur de séparation vient d'être achevé au niveau de Qalandiya, le feu vert est enfin donné. L'inauguration du chantier se déroule le 24 janvier, en présence des représentants de USAID, l'agence de coopération internationale américaine qui finance une partie du projet. Mais le 25 janvier, le Hamas remporte à la surprise générale les élections législatives palestiniennes et le lendemain le chantier est suspendu, boycottage des islamistes oblige. Il faudra attendre un an et demi et la mise en place de l'éphémère gouvernement d'unité nationale pour qu'un nouveau contrat soit signé.

Les soucis de l'Autorité palestinienne ne sont pas pour autant terminés. Le gouvernement israélien a en effet refusé d'aménager un itinéraire bis. Il s'est également opposé au déploiement de policiers pour réguler le trafic le long du chantier. Depuis deux mois, les automobilistes sont donc obligés de zigzaguer, pare-chocs contre pare-chocs, entre les pelleteuses et les ouvriers. Un ultime goût de chaos avant la délivrance.

Sources Le Monde

Posté par Adriana Evangelizt

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