Proche-Orient : la paix impossible ?

Publié le par Adriana Evangelizt

Proche-Orient, la paix impossible ?

par Michel Bôle-Richard

L’agitation diplomatique déployée pour tenter de relancer le processus de paix au Proche-Orient va-t-elle aboutir ? Tzipi Livni, ministre israélienne des affaires étrangères, a reconnu, le 13 janvier, la nécessité de donner un "horizon politique" aux Palestiniens. Avec Condoleezza Rice, secrétaire d’Etat américaine, toutes deux vont tenter de réactiver la "feuille de route", le plan de paix international porté par le "Quartet" - Etats-Unis, Russie, ONU, Union européenne -, et de renouer un dialogue constructif avec le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas. Une rencontre tripartite avec Ehoud Olmert, premier ministre israélien, est prévue lundi 19 février. La dernière occasion à saisir ? Beaucoup de temps a été perdu depuis le fameux discours de George Bush du 24 juin 2002 dans lequel il exprimait le désir de voir "deux Etats vivant côte à côte, en paix et en sécurité", y voyant "la clef pour la paix".

Après, Yasser Arafat a été déclaré "hors jeu" tant par Israël que par les Etats-Unis, qui ont réclamé la création d’un poste de premier ministre palestinien avec lequel des pourparlers pourraient être possibles. Ce qui fut fait. Nommé, Mahmoud Abbas a vite lâché prise en septembre 2003, après six mois de rebuffades, se heurtant à l’intransigeance d’Ariel Sharon et à la mauvaise volonté de Yasser Arafat. Son successeur, Ahmed Qoreï, n’a pas eu plus de succès. Entre-temps, la "feuille de route" avait été adoptée, en juin 2003, à Aqaba, lors d’une cérémonie officielle en présence de George Bush. Ce ne fut pas sans peine. Les Israéliens avaient émis de sérieuses réticences et avaient proposé quatorze amendements. Sa mise en application n’a jamais commencé, ni du côté palestinien ni du côté israélien. Chaque partie reproche à l’autre de ne pas faire le premier pas.

Dans une lettre adressée à Ariel Sharon, le 14 avril 2004, M. Bush estime que la "feuille de route" est le sésame de la paix et réclame aux Palestiniens "une réforme politique fondamentale qui comprenne une démocratie parlementaire forte". La mort de Yasser Arafat, le 11 novembre 2004, fournit cette occasion. M. Abbas est élu le 9 janvier 2005. Avec ce modéré, l’optimisme renaît. Deux rencontres ont lieu avec Ariel Sharon, l’une à Charm el-Cheikh, le 8 février, et une seconde, le 21 juin, à Jérusalem. L’impasse est totale. M. Sharon parle sécurité et M. Abbas demande des gestes et l’ouverture de pourparlers. Puis, le 25 janvier 2006, c’est la victoire du Hamas aux élections générales et la fin de toute velléité de discussions. La "feuille de route" n’est plus qu’un chiffon de papier. En quatre ans, aucun progrès n’a été accompli. Au contraire.

Dans ces conditions, comment est-il possible de réamorcer de véritables négociations ? En privé, tout le monde admet que la "feuille de route" est un document dépassé. Il devait normalement aboutir, en trois phases, à la création d’un Etat palestinien en 2005. Mme Livni et Mme Rice sont prêtes à faire l’économie de la première phase, qui consistait dans le démantèlement des organisations armées et la destruction des colonies sauvages. Toutes deux voudraient commencer par la seconde, c’est-à-dire la mise en place d’un Etat palestinien dans des frontières temporaires. M. Abbas refuse catégoriquement, estimant que trop de temps a déjà été perdu et qu’il faut discuter désormais du fond des choses, c’est-à-dire d’un Etat avec des frontières définitives et reconnues par la communauté internationale, qui seraient, à peu de choses près, celles de 1967 avant la guerre de six jours. Cet Etat aurait, bien évidemment, Jérusalem-Est comme capitale.

Il faut donc revenir quarante ans en arrière. Et, à cela, les Israéliens ne sont pas prêts. Ils ne sont pas prêts à renoncer à l’intégration à Israël de trois grands blocs de colonies ni à partager Jérusalem. Sans parler de la délicate question du retour des réfugiés, qui a toujours été un insurmontable casse-tête, même si M. Abbas s’est déclaré disposé à "une solution juste et négociée".

Reconnaissance contre retrait

Et, alors que le plan de paix arabe (du roi Abdallah d’Arabie saoudite) adopté en mars 2002, à Beyrouth, lors du sommet de la Ligue arabe est de nouveau évoqué par Ehoud Olmert, rien n’est fait pour qu’il soit véritablement pris en compte. Il prévoit en effet la reconnaissance de l’Etat juif par les vingt-deux pays arabes en échange d’un retrait sur la ligne verte, la frontière héritée de la création d’Israël. A l’époque, Ariel Sharon avait traité cette initiative par le mépris. Et si elle est évoquée de nouveau aujourd’hui, c’est parce que les Américains voudraient rassembler dans une alliance tous les Etats modérés de la région afin de faire rempart aux menées islamistes. Pour ce faire, il faut que des progrès soient accomplis dans la résolution du conflit israélo-palestinien. C’est ce à quoi s’attache désormais Washington afin de tenter d’obtenir quelques succès au Moyen-Orient.

La réunion du 19 février doit être décisive. La seule grande question qui se pose est de savoir si MM. Abbas et Olmert sont en mesure d’imposer à leurs peuples respectifs les concessions nécessaires. Ni l’un ni l’autre n’est en position de force. M. Olmert a perdu tout crédit politique en neuf mois et est affligé du taux de popularité le plus bas jamais supporté par un chef de gouvernement. M. Abbas est confronté à une guerre civile larvée dans la bande de Gaza et il n’est pas certain que le gouvernement d’union nationale décidé à La Mecque, le 8 février, permette d’obtenir la levée du boycottage international.

Est-ce que deux dirigeants affaiblis peuvent progresser sur le chemin de la paix ? Ils ne se sont rencontrés qu’une seule fois, le 23 décembre 2006. Et, depuis, les questions d’ordre purement pratique évoquées lors de ces entretiens n’ont guère avancé. Certes, le gouvernement israélien a accepté de relâcher 100 millions de dollars (76 millions d’euros), sur les 550 retenus illégalement par Israël - produit des taxes et des droits de douane - afin d’étrangler le gouvernement dirigé par le Hamas. Concernant la libération des prisonniers et la levée de certaines restrictions comme les barrages en Cisjordanie pour faciliter la vie quotidienne des Palestiniens, les choses n’ont pas vraiment bougé. Alors, comment sera-t-il possible d’évoquer la création d’un Etat palestinien dans les conditions actuelles ou, à tout le moins, d’accomplir quelques progrès dans cette voie ? Un diplomate européen a dit que c’était "le moment ou jamais", qu’il y avait "une fenêtre d’opportunité" et que, sinon, comme l’a déclaré le roi Abdallah de Jordanie "en l’absence de pas tangibles et spécifiques dans un avenir proche, le cycle de violence va reprendre". Cet affaiblissement rend d’autant plus grande la responsabilité des Etats-Unis et du "Quartet".

Michel Bôle-Richard - Le Monde, le 16 février 2007

Sources Info Palestine

Posté par Adriana Evangelizt

Publié dans HISTOIRE-FALSIFICATION

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