Stupéfiante indulgence pour un Etat voyou

Publié le par Adriana Evangelizt

Stupéfiante indulgence pour un Etat voyou

par Bruno Guigue

DANS cette nouvelle guerre qui embrase le Proche-Orient, le plus effrayant n’est pas la violence déchaînée par l’État hébreu : c’est l’incroyable indulgence dont elle bénéficie. Qu’après plusieurs semaines de féroces bombardements perpétrés sur un petit pays, aucune instance internationale n’ait appelé à un cessez-le-feu est consternant : ni le G8, ni l’ONU, ni l’Union européenne n’a été capable de cette décision de simple bon sens. Est-ce le signe que nous entrons dans une ère nouvelle ? Aucun conflit armé entre deux États ne s’était traduit, jusqu’à présent, par une impuissance aussi flagrante de la communauté internationale. Or, cette impuissance est d’autant plus choquante qu’elle est volontaire : elle résulte, en fait, de la volonté d’un seul membre de cette communauté internationale, les États-Unis d’Amérique.

Paralysée par le veto américain en faveur d’Israël, toute initiative internationale semble donc devoir passer sous les fourches caudines de l’hyper puissance. En germe depuis la disparition de l’Union soviétique, cette profonde asymétrie de la scène mondiale éclate au grand jour. Elle libère, du coup, les énergies dévastatrices d’un État d’Israël dont les dirigeants ont abdiqué toute volonté de négociation. L’administration Bush a achevé le processus engagé avec la victoire de Ronald Reagan en 1980 : la montée en puissance d’un néo-impérialisme qui n’hésite pas à recourir “préventivement” à la force. Le gouvernement Olmert, de son côté, a achevé le processus entamé au lendemain de l’assassinat d’Itzhak Rabin en 1995 : la destruction systématique de toute opposition, armée ou non, aux ambitions d’Israël.

La nouvelle guerre de l’État hébreu contre le Hezbollah reproduit cette profonde asymétrie de l’ordre international. C’est une guerre où le déséquilibre des forces est gigantesque. L’État d’Israël dispose d’une force militaire colossale, quasiment invaincue sur les théâtres d’opérations du Proche-Orient et alimentée en permanence par les transferts technologiques en provenance de son puissant protecteur américain. Le Hezbollah, lui, est un parti politique minoritaire libanais qui dispose d’une milice dépourvue d’encadrement militaire et d’armement lourd.

La comédie de l’agresseur agressé

La dramaturgie orchestrée autour des roquettes lâchées sur Israël est un écran de fumée dont on voit bien qu’elle profite aux deux belligérants : elle permet au Hezbollah de défier Israël et à Israël de jouer la comédie de l’agresseur agressé. En réalité, ce sont des pétards mouillés qui n’ont heureusement fait qu’une dizaine de victimes civiles en Israël, alors qu’un millier de Libanais (si on inclut les disparus) ont déjà péri sous les bombes de Tsahal. Le parallèle médiatique entre bombardements israéliens et tirs de Katioucha, par lequel les médias dominants croient sans doute témoigner de leur objectivité, est grotesque. On a beau leur consacrer le même temps télévisuel, le déséquilibre des pertes civiles est énorme : à l’image de cette guerre profondément asymétrique entre le fort et le faible où le fort bénéficie, en outre, de l’appui massif de l’hyper puissance mondiale.

Tout se passe, en fait, comme si les dirigeants israéliens avaient oublié pour de bon toute dimension politique. Fascinés par leur propre puissance militaire (il est frappant de voir comme ils s’en gargarisent), ils oublient que leur courageuse aviation n’a tué jusqu’à présent que des civils (lors des combats terrestres, en revanche, le bilan des opérations est nettement moins glorieux). Pourtant, cette rage destructrice ne les empêche pas d’inviter les Libanais à se ranger à leurs côtés contre le Hezbollah. À croire que la vertu pédagogique des bombardements, même ponctuée de lâchers de tracts, a ses limites : un récent sondage indique que 86% des Libanais soutiennent la résistance islamique. Il y a peu de chance, par conséquent, qu’Israël parvienne à rééditer son exploit de 1982, où il avait fait élire un président phalangiste après avoir assiégé et bombardé Beyrouth durant trois mois, tuant au passage 15.000 civils.

L’avantage militaire (tout relatif) ne préjuge donc pas nécessairement de la victoire politique. Et le Hezbollah, sur ce plan, dispose d’atouts indéniables : sa solide implantation au sein de la communauté chiite libanaise, le soutien qu’il a obtenu de la part des autres forces politiques dans le pays, sans parler de ses relations privilégiées avec l’Iran et la Syrie, sur lesquelles de nombreux commentateurs semblent faire une véritable fixation obsessionnelle. Pour comprendre l’importance du Hezbollah, il suffit pourtant d’aller au Liban, au lieu d’imaginer de sombres complots syro-iraniens pour la domination du Moyen-Orient. La force du Hezbollah, c’est le soutien du peuple libanais. Et si tel n’est pas le cas, on se demande bien pourquoi Israël aujourd’hui s’acharne à détruire le Liban tout entier.

Si le Hezbollah cède, il n’y a plus de Liban

De même qu’elle soude psychologiquement les Libanais autour du Hezbollah, la nouvelle invasion israélienne a paradoxalement pour effet d’en montrer l’utilité militaire. Si les infrastructures de la résistance islamique sont écrasées dans le Sud du pays, qui s’opposera à la marche des blindés israéliens vers Beyrouth ? Le patriarche maronite et la famille Hariri ? Sûrement pas. Encore confuse il y a trois semaines, l’idée que le Hezbollah constitue un rempart contre Israël s’impose désormais avec l’évidence d’une force matérielle : si le Hezbollah cède, il n’y a plus de Liban, mais un nouveau bantoustan israélien.

Il est clair que l’État hébreu est déterminé à éradiquer la résistance islamique, au Liban comme en Palestine. En témoigne la brutalité de l’agression contre le Liban, mais aussi la sauvagerie des attaques lancées simultanément contre Gaza. Dans les deux cas, c’est la même méthode : des bombardements répétés pour terroriser la population et la mettre à genoux. Puis l’assassinat des responsables politiques, pour décapiter la résistance, interdire toute issue négociée, fermer définitivement la porte à un règlement au fond. Politique évidemment à courte vue, suicidaire à long terme, mais qui a pour elle les vertus de l’efficacité tant qu’on est incontestablement le plus fort.

Particulièrement éclairante, à cet égard, est la genèse de la crise actuelle. Qui peut croire un seul instant que l’offensive contre le Liban est la simple réplique à l’enlèvement de deux soldats par les miliciens du Hezbollah ? Comment se fait-il que la riposte ait été aussi brutale et aussi indiscriminée, frappant d’emblée la totalité du territoire libanais ? Pourquoi Israël refuse-t-il obstinément tout cessez-le-feu et tout échange de prisonniers ? Simple prétexte, le double enlèvement du 12 juillet fournit aux dirigeants israéliens, en effet, l’occasion rêvée d’une nouvelle guerre israélo-arabe dont le bénéfice pourrait être multiple.

Le Liban, envahi, occupé et bombardé sans relâche durant des décennies

Le bénéfice immédiat en serait l’élimination du Hezbollah. Pas seulement parce que la Galilée est à portée de ses roquettes. Mais surtout parce que cette présence armée est un obstacle à la domination du Liban. Une fois neutralisée la résistance islamique, le Liban pourra retrouver son statut d’État-tampon, sans véritable souveraineté, ni cohésion nationale, ni force militaire. Israël ne saurait tolérer à sa frontière Nord un État fantoche : c’est la raison pour laquelle, depuis trente ans, il a systématiquement violé son espace aérien et ses eaux territoriales, expédié les tueurs du Mossad pour y perpétrer d’innombrables assassinats, détruit sa flotte aérienne civile, envahi son territoire en 1978 et même poussé son offensive militaire en 1982 jusqu’à Beyrouth.

Envahi, occupé et bombardé sans relâche durant des décennies, le Liban n’a vu le départ des troupes israéliennes du Sud du pays qu’en 2000. Cette victoire tardive, il la doit au Hezbollah, qui a harcelé l’occupant pendant vingt ans, tuant 900 de ses soldats et le contraignant à un retrait unilatéral. La violente attaque israélienne engagée le 12 juillet a donc toutes les caractéristiques d’un règlement de comptes. Mais il est possible que l’État hébreu veuille aller plus loin, et cette perspective est on ne peut plus inquiétante. Car les Israéliens ne sont pas seuls, et leur initiative s’inscrit probablement dans un plan d’ensemble. La caution américaine apportée à l’agression israélienne est si grossière, en effet, qu’on ne saurait écarter cette hypothèse.

Que les dirigeants américains pérorent avec emphase sur la “démocratisation” du Moyen-Orient au moment où l’aviation israélienne procède à la destruction systématique du Liban est d’une confondante absurdité. Mais l’axe américano-israélien suit une logique de la force qui défie la force de la logique. Empêtrée dans l’infernal bourbier irakien, l’administration Bush est d’autant plus à la recherche d’une porte de sortie qu’elle doit aussi relever le défi du nucléaire iranien sans perdre la face. La tentation est grande, chez les faucons de Washington, d’effectuer une fracassante sortie “par le haut” en poussant à l’extension du conflit israélo-libanais pour justifier des frappes aériennes contre la République islamique. Les néo-conservateurs, dans la presse américaine, piaffent d’impatience et ne cessent d’argumenter en ce sens, estimant que l’occasion est trop belle pour régler son compte, simultanément, au Hezbollah et à ses bailleurs de fonds iraniens.

La stupéfiante indulgence accordée à l’État hébreu nous aura alors bel et bien conduits à la catastrophe.

Sources : Témoignages

Posté par Adriana Evangelizt

Publié dans CONNEXION ISRAEL USA

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D
Lettre a l'éditeur :<br /> <br /> M. Bruno Guigue a l'esprit un peu égaré en signalant que le Hizbollah est un Etat...Il serait plus juste de souligner qu'elle est une organisation terroriste qui s'est implanté dans un Etat libanais phantôme. Ce conflit est une opposition entre un Etat légitime (Israël) et une organisation terrorisme qui exerce en toute liberté un pouvoir étatique au sein d'un Etat existant (le Liban) mais dénué de pouvoir étatique...Une armée incapable d'éradiquer le mal qui règne au sein de sa population menancée n'est plus un Etat : le devoir prioritaire d'un Etat est de protéger son peuple de l'intérieur et de l'extérieur... Menacée, parce que toutes les organisations terroristes, aujourd'hui, opèrent au sein même des populations. L'aspect social y est certes pour quelque chose. Quand un gouvernement est corrompu (gouvernement palestinien par exemple) et laisse son propre peuple dans la misère, il est toute suite facile de constater la déviance de ce peuple ; Je ne n'emploie pas, à juste titre, le mot « comprendre », parce qu'il est incompréhensible de quiconque de choisir la corruption à l'intégrité de soi ! En retour, des aides sociales apportées par ces organisations extremistes, ce peuple « si intègre » se doit de livrer sa chair aux projets kamikazes perpétrés contre le Peuple civil israélien. Mais tout naturellement, la publicité sera donné au kamikaze lui même, façon de le glorifé un peu plus aux yeux de tous, et l'information sera mis sur la misère de ce pauvre peuple qui n'avait d'autres choix que de punir le seul coupable de la région : Israël...Après tout le Peuple Israélien a su développer cette région désertique. A côté de ça, il serait condamnable de dénoter que la misère provient d'un gouvernement corrompu qui perçoit des centaines de millions de subsides de la communauté internationale, et du monde arabes. Miaux vaut des armes que de nourrir un peuple ! Voilà l'image d'une communauté internationale impuissante ! <br /> Quant au droit de véto, rappelons que plus grave encore, la Russie (qui n'a nullement disparu de la scène polituque) et la Chine s'opposent catégoriquement à toutes sanctions contre l'Iran (aujourd'hui au devant de la scène) et la Corée du Nord (pays barbare oublié), pays qui menacent non pas tel ou tel pays (quoique le seul dessein de l'Iran est l'éradication de l'Etat d'Israël...mais ne le dite pas trop fort !), mais la Planète entière ! Leur tergiversation et leurs efforts pour retarder toute prise de décision, donnent à ces deux pays le temps nécessaire aux développement d'armes de destruction! Et pourquoi une opposition de ces deux grandes puissances, puissances oubliées par M. Bruno Guigue : pour des raisons purement politiques...pour ne pas dire pour l'Or noir iranien (il est vrai que le pétrole coûte cher !)...<br /> Notons, certes, que l'Amérique tire son jeu de la région en exerçant son droit de veto...Mais sans les vétos américains, Israël serait un Etat depuis longtemps réduite au silence, voir un Etat depuis longtemps rayer des cartes !<br /> <br /> Négociation. Un terme qui n'a guère son sens de nos jours. La négociation est le jeu des concessions mutuelles. Négocier ne veut pas dire se vendre ! Par ailleurs, la négociation est trop souvent imposée à Israël...Attendons un peu de voir combien devra payer Israël pour récupérer ces trois soldats kidnappés (Deux par le Hizbollah et un par les organisations terroristes palestiniennes). Le ratio sera probablement, comme par le passé, de 3 pour 500 ou pour 1000 ! Un véritable attachement d'un Etat pour son Peuple. <br /> L'argument de ces dernières années, ici repris par M. Bruno Guigue, est l'image du fort (Israël) contre le faible (le Hizbollah). Pour mieux faire passer cette image, on ajoute l'ingrédient américain ! Certes chacunes des répliques d'Israël aux agressions dont elle a du faire face ont mis en exergue son impressionnante puissance militaire. Pourtant Israël use de sa puissance que de manière défensive. Là encore ces dernières années ont montré, de la part de l'ensemble de nos commentateurs (professionnels ou en herbes, y compris M. Bruno Guigue), qu'Israël ne pouvait être que l'Agresseur du Moyen Orient ! L'exemple récent du Liban le montre une fois de plus... En tout cas à la lecture des nombreux articles, l'agression sioniste est mis en avant. Tellement d'ailleurs, qu'on en oublie le pourquoi ? Mais mettons cela de côté, l'importance n'étant ni de savoir que l'agression a débuté avec la tuerie perpétrée par le Hizbollah contre des soldats israéliens et l'enlevement de deux autres (Ehud GOLDWASSER et Eldad REGEV), ni de constater que la Communauté Internationale a fait l'impasse du retour de ces deux soldats lors de l'adoption de la Résolution 1701... Ici, l'importance est de montrer « l'asymétrie » des forces. Pourtant chaque Etat est détenteur de sa propre puissance, et l'armée libanaise n'est nullement intervenue dans un conflit qui n'était pas le sien... Israël a frappé les lignes du Hizbollah. Ce constat pose le problème des victimes civiles... libanaises. Après tout les « pétards mouillés tirés par le Hizbollah n’ont heureusement fait qu’une dizaine de victimes civiles en Israël » ! L'imprécision, M. Bruno Guigue, des « pétards mouillés » du Hizbollah n'ont fait que des dizaines de mort côté israéliens. L'imprécision. C'est juste une question de temps avant que le Hizbollah n'obtiennent un réarmement plus efficace (sous le nez et la barbe de la FINUL) ! Les victimes civiles libanaises : Il convient de souligner qu'Israël a invité la population a de multiples reprises à quitter les zones de combat, mais oublions ! Il convient également de souligner que la population libanaise accueillait en son sein et en toute connaissance de cause les membres de cette organisation terroriste, avec les conséquences qui s'y attachent. Mais oublions ! Il convient enfin de rappeler que la population libanaise n'a eu de cesse de scander son attachement et son soutien au Hizbollah malgré ses morts. Là n'oublions pas. Comme nous n'oublierons pas l'attachement des palestiniens et de leur leader avec le totalitariste et barbare de grand renom : saddam hussein. Je n'ai aucune haine particulière contre le peuple libanais. Mais je n'accepte guère qu'un peuple accepte de servir, en toute connaissance de cause, de bouclier humain à ses frères terroristes ! <br /> Vrai est l'erreur israélienne d'avoir usé, comme par le passé, de son aviation pour régler ce combat de guérilla. Israël a trop longtemps cru que sa puissance militaire serait un frein aux agressions de toute part. A tord.<br /> <br /> Pour finir le liban n'est en rien au Hizbollah ou a toutes autres organisations terroristes, mais seulement au peuple libanais. La disparition du Hizbollah n'entrainera nullement la fin du liban et du peuple libanais. Pour preuve, l'Egypte et la Syrie sont toujours des Etat du monde, malgré leur agression surprise en 1973 lors de la guerre de Kippour... pourtant rien n'aurait pu arrêter les israéliens dans leur bon droit de frapper le coeur de ses deux Etats et de les réduire à néant... Mais la politique israélienne n'a pas été et n'est pas la destruction des autres peuples, mais la protection de son Peuple envers et contre tous. Dès lors, il est navrant de constater que même agressé, Israël suscite la désapprobation et la haine du monde.
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