OCCUPATION AU SERVICE DU RACISME
"LOD" : L' OCCUPATION AU SERVICE DU RACISME... VICE VERSA
Sur 250 mètres, un mur de béton armé haut de 4 mètres court à travers les broussailles et les tas d’ordures, longeant l’unique route goudronnée de Shanir. Le chantier est à l’image de ce quartier arabe de la ville israélienne de Lod : fait de bric et de broc, désolé, inachevé. Une décision de justice a suspendu temporairement les travaux. En attendant qu’ils reprennent, le propriétaire juif de la maison la plus proche des habitations arabes s’est barricadé derrière un assemblage de vieilles tôles ondulées, de grillages et de contreplaqués bancals.
Pour lui, comme pour les promoteurs de ce mur planté en plein cœur d’une des cinq villes "mixtes" du pays, l’intention est claire : séparer, physiquement, les Arabes des Juifs de la ville. Lod, située à quelques kilomètres de Tel-Aviv compte 74 000 habitants, dont un quart sont les descendants des Arabes demeurés sur place en 1948 lors de la création d’Israël ou des Bédouins chassés de leurs terres au sud du pays.
La ville est l’une des plus pauvres du pays. La municipalité affiche un déficit de 40 millions d’euros. Un sondage récent montrait que 60 % des habitants juifs de la ville se disaient prêts à quitter Lod s’ils en avaient les moyens. La population juive, composée pour une bonne part d’immigrants russes et éthiopiens, subit de plein fouet la crise économique de ces dernières années. Par ricochet, la population arabe, traditionnellement plus démunie, se paupérise. Répartis dans cinq quartiers, dont la "vieille ville", démantibulée dans les années 1970 et 1980 par une politique d’urbanisation sauvage, les Arabes de Lod ressentent, davantage encore que les Arabes israéliens des autres villes mixtes, une discrimination soulignée par toutes les statistiques.
Ce phénomène de ghettoïsation s’est renforcé, il y quelques mois, avec le chantier du "mur de Lod" et s’est accéléré en mai, lorsque sont apparus, à l’entrée et à la sortie du quartier stigmatisé de Shanir, deux check-points. Depuis lors, trois policiers installés derrière une table sous un parasol surveillent 24 heures sur 24 les allées et venues des habitants. Ils contrôlent les papiers d’identité, exigent des automobilistes les raisons de leur visite sur place et relèvent le numéro d’immatriculation du véhicule. On est loin de la sophistication de la "clôture de sécurité" qui barre le passage entre Israël et la Cisjordanie, mais l’impression de quitter un monde pour un autre est la même.
Car Shanir a beau abriter quelque 3 000 citoyens israéliens, l’endroit s’apparente davantage à une "réserve" qu’à un véritable quartier. Ici, depuis des années, les constructions ont poussé en toute illégalité, faute de terrains disponibles pour les Arabes. Régulièrement, des destructions sont ordonnées ; en 2003, quinze maisons ont été rasées.
Les services municipaux n’y procurent ni ramassage des ordures ni transports publics. A tous les coins de rue, des tas d’immondices brûlent à petit feu. Les habitants ont payé de leurs deniers l’asphalte de la seule route carrossable du quartier. Un labyrinthe de fils électriques amène le courant d’on ne sait où. Des associations ont dû remuer ciel et terre pour que le chemin de terre, qui mène à l’unique crèche du quartier, soit recouvert de cailloux.
Officiellement, le dispositif policier a été mis en place autour de ce quartier délabré pour lutter contre le trafic de drogue, principale source de revenus pour nombre de jeunes au chômage. "Comme dans tous les quartiers défavorisés du monde, le trafic de drogue a fait florès ici ", reconnaît Maha Al-Nakib. Pour appuyer ses dires, la jeune travailleuse sociale montre des flèches peintes en rouge et en vert sur les murs de Shanir : les "planques" des trafiquants. "Depuis l’installation des check-points, les vendeurs se sont installés dans un autre endroit de la ville, mais les problèmes demeurent. Ces quartiers ont besoin d’une vraie politique sociale ; au lieu de cela, il leur manque des centres sociaux, des crèches, des écoles et des places dans l’unique lycée arabe de la ville." Il y a un an, une école a quand même été inaugurée dans l’un des quartiers arabes voisins de Shanir ; un poste de police s’est installé dans les locaux initialement prévus pour la bibliothèque. Sollicité, le maire (Likoud) de la ville, n’a pas souhaité s’exprimer sur sa politique.
Aref Mohareb, l’un des trois conseillers municipaux arabes sur les dix-neuf que compte la ville, regrette, pour sa part, "l’abandon" dans lequel ses concitoyens arabes sont tenus. "D’année en année, la discrimination est de plus en plus patente, car à Lod la population arabe augmente et les juifs pensent que nous mettons la ville en danger. D’une manière ou d’une autre, ils souhaiteraient nous voir partir." Un projet de "rejudaïsation" de Lod, défendu, notamment, par des colons de Cisjordanie, prévoit de créer un quartier juif en plein cœur de la vieille ville, en y amenant 150 familles.
L’organisation de défense des droits des Arabes israéliens Mossawa a porté plainte, le 5 juillet, contre la mairie d’Askhélon, une ville côtière d’Israël, pour protester contre les"actes racistes" encouragés par certains membres de son conseil municipal. Plusieurs élus avaient, en effet, demandé au maire d’interdire les lieux de détente de la ville aux Arabes israéliens et de les empêcher de passer la nuit sur place.
L’affaire, relayée par la presse israélienne, est intervenue quelques jours après la parution d’un sondage indiquant que 63,7 % de la population juive d’Israël estiment que le gouvernement devrait encourager l’émigration des Arabes israéliens. 55 % jugent, en outre, que cette population, qui représente 20 % des Israéliens, constitue un danger pour la sécurité de l’Etat.
Sources : http://www.aloufok.net/article.php3?id_article=1406
Posté par Adriana Evangelizt