Le colonialisme est un attentat à la dignité

Publié le par Adriana Evangelizt

Conférence de Jacques Vergès à Oran

"Le colonialisme est un attentat pour la dignité"

par A. S. Ahcène

Tout au long de son intervention, après une brève rétrospective sur les motivations et les causes qui l’ont amené à revêtir la robe noire, Jacques Vergès est revenu longuement sur la passion qui l’anime depuis maintenant plus d’un demi-siècle.

Il dira d’emblée devant un parterre de magistrats et de jeunes avocats : « Lorsqu’on est égoïste, on parle de sa passion. » Il abordera ensuite le désormais célèbre concept de « procès de la rupture » et dira : « La rupture est une pratique vieille comme le monde, seulement nous l’avons conceptualisée. » A ce sujet, il rappellera ses débuts dans le collectif de défense des militants du FLN, notamment le procès de ce qui était qualifié à l’époque par l’armée coloniale de « procès des poseuses de bombes ». Il narrera son voyage à la Réunion : « J’ai vu ce qu’était le colonialisme à la Réunion et à Madagascar puis en Algérie. » Et d’ajouter : « Le colonialisme est un attentat contre la dignité des gens. » Abordant ensuite le volet relatif à la loi du 23 février, notamment en son article 4, il dira : « C’est un mensonge complet, ses concepteurs et ses rédacteurs devraient être poursuivis pour apologie de crimes de guerre. » Il étayera longuement « sa plaidoirie », fustigeant au passage les tribunaux internationaux (TPI, entre autres) pour dire : « C’est du bidon. Nous sommes face à une conception, relayée notamment par certains intellectuels, qui veut que tous les autres doivent penser comme moi, sinon ils sont des sauvages. » Et d’affirmer : « C’est un point de vue purement ethnocentriste. »

D’ailleurs, il n’omettra pas « d’épingler au passage Albert Camus » : « C’est un grand écrivain qui a su exprimer les paysages de l’Algérie avec beaucoup de force et de sensibilité, mais quand on lit L’Etranger, rappelez-vous, Meursault a un nom, Raymond a un prénom, mais la maîtresse de Raymond, c’est la mauresse, elle n’a pas de nom. C’est un nom générique, comme un chien, un doberman, etc. Là, on a un regard colonial parfait. On est sensible à la beauté des paysages, à juste titre d’ailleurs, mais les êtres qui y habitent, on les réduit à l’état de bêtes. » Lors de la conférence de presse, Me Jacques Vergès reviendra longuement sur la liberté de la presse, à la laquelle, dira-t-il, « il est très attaché », mais n’abordera à aucun moment les arrestations et l’emprisonnement des journalistes en Algérie et dira : « Je ne suis pas le fonctionnement de la justice en Algérie ( ?) », mais qualifiera « d’absurde » la reproduction des caricatures sur le Prophète Mohamed, notamment par certains journaux français : « Ils ont augmenté leur tirage de 200 000 exemplaires. La plus-value n’a pas été donnée à une œuvre caritative, mais elle est allée directement in the pocket. » Et d’ajouter pour dénoncer la politique du deux poids deux mesures : « Si on avait reproduit une caricature de Sharon avec sur la tête le cadavre d’un Palestinien, que se serait-il passé ? On ne plaisante pas avec la shoah. »

Pour ce qui est de la tendance à qualifier la vague d’indignation, à travers le monde musulman, suscitée par les caricatures en question, de « choc des cultures », Jacques Vergès dira : « Il n’y a pas de choc des civilisations, il y a l’ethnocentrisme qui consiste à dire : nous sommes supérieurs et ceux qui ne l’acceptent pas, alors manifestement, il y a un choc des cultures. » A une question relative au terrorisme, il dira : « La lutte contre le terrorisme est une gesticulation occidentale. Le terrorisme n’est pas une entité, c’est un moyen de défense. Qu’est-ce qu’il y a de commun entre les clones du FLNC en Corse et Oussama Ben Laden ? Il n’y a rien de commun, ni entre ceux de l’IRA et ceux de l’ETA en Espagne. Le terrorisme est une arme de pauvre, mais cela dépend de ce qu’il veut en faire. En faire un usage criminel ou de libération ? Dire que nous combattons le terrorisme, c’est une grande mystification. » En réponse à la question : « Pouvez-vous défendre Ben Laden ? » Jacques Vergès répondra : « S’il me désigne, ce sera un grand honneur. »

Sources : EL WATAN

Posté par Adriana Evangelizt

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