Du "fascisme islamique" de Bush

Publié le par Adriana Evangelizt

Une excellente analyse sur les faits du passé que l'on retrouve à l'heure actuelle. A croire que les hommes qui nous dirigent sont sensés répéter les mêmes erreurs sans tenir compte de l'Histoire qui nous a précipités vers la seconde guerre mondiale, les évènements actuels préparant le terrain à un troisième conflit de grande envergure.

Du « fascisme islamique » de Bush 

par Sergio Romano

Historien et éditorialiste

 

Dans sa première réaction aux attentats échoués de Londres, le président des Etats-Unis a déclaré que son pays « est en guerre avec des fascistes islamiques ». L'expression « fascisme islamique » n'est pas une contribution originale de George W. Bush à la science politique. Elle est utilisée depuis quelque temps, même par des intellectuels de la gauche libérale américaine qui parlent souvent, dans ce contexte, de « totalitarisme musulman ». En Europe aussi, ces comparaisons avec des phénomènes appartenant au passé de l'Occident sont de plus en plus fréquentes. Un journaliste italien, d'origine égyptienne, Magdi Allam, a défini l'Iran de Mahmoud Ahmadinejad comme un « régime nazi-islamique ».
Dans d'autres cas, l'auteur de la comparaison préfère choisir un épisode précis de l'Histoire. Pour mieux décrire l'aspect et l'état d'âme des jeunes conscrits israéliens lors des opérations militaires au Liban, Bernard-Henri Lévy a évoqué, dans un article publié par « Le Monde » et le « Corriere della Sera », « la joyeuse bousculade des bataillons de jeunes républicains décrits, une fois encore, par Malraux ». La guerre du Liban serait par conséquent une nouvelle guerre civile espagnole dans laquelle les démocrates européens auraient le devoir de se rallier aux côtés d'Israël contre le phalangisme musulman.
Un autre intellectuel français, Jacques Attali, a rappelé deux épisodes qui permettent de mieux comprendre, à son avis, la réaction des Israéliens aux attaques du Hezbollah : la remilitarisation de la Ruhr décidée par Hitler en mars 1936, et le déploiement de missiles soviétiques à Cuba en octobre 1962. Dans le premier, les démocraties ne firent rien et préparèrent ainsi la guerre. Cette comparaison en rappelle une autre : celle par laquelle Guy Mollet et Anthony Eden justifièrent l'opération franco-anglaise à Suez après la nationalisation du canal. Ils étaient convaincus que le président Nasser était un nouvel Hitler et qu'il ne fallait pas tomber dans le piège d'un nouveau Munich.
Une autre comparaison intéressante est celle de l'écrivain israélien Abraham B. Jehoshua, observateur sensible et équilibré de la question palestinienne. Dans un article récent, il a rappelé qu'après la fondation de l'Etat israélien le Premier ministre Ben Gourion exigea des organisations paramilitaires juives la cessation de toute activité et demanda à Menahem Begin, chef de l'Irgoun (organisation armée nationaliste juive, NDLR), de livrer immédiatement les armes arrivées par le bateau « Altalena », qui avait jeté l'ancre près de Tel-Aviv. Begin refusa et Ben Gourion n'hésita pas à faire bombarder le navire. Pourquoi le président palestinien Abou Mazen n'a-t-il pas suivi, à l'égard du Hamas, l'exemple de Ben Gourion ?

Les historiens savent que les comparaisons historiques cachent souvent des anachronismes et de fausses analogies. A ceux qui évoquent le « fascisme islamique » on pourrait rappeler que le fascisme fut un modèle pour les idéologues du parti Baas, mais n'eut aucune influence significative sur la pensée religieuse des Frères musulmans et d'Oussama ben Laden. A Bernard-Henri Lévy on pourrait faire observer que le problème, dans la question palestinienne, n'est pas l'idéologie, comme en Espagne, mais la possession de la terre. A Jacques Attali on pourrait répondre que la dissimulation de missiles nucléaires à Cuba par l'Union soviétique à l'époque de la guerre froide ne peut pas être comparée à l'utilisation de missiles conventionnels par quelques milliers d'hommes sur la frontière israélienne. Et à Abraham B. Jehoshua, enfin, que Ben Gourion, lorsqu'il donna l'ordre à Begin de mettre fin à toute activité militaire, avait déjà atteint son but : la création de l'Etat d'Israël. Même s'il avait la force de donner des ordres à Hamas, Abou Mazen, malheureusement, ne pourrait pas annoncer à ses compatriotes l'existence d'un Etat palestinien.

Sources : LES ECHOS
 
 

Publié dans HISTOIRE-FALSIFICATION

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