Une campagne contre Norman Finkelstein

Publié le par Adriana Evangelizt

Pour en savoir plus sur le désinformateur sioniste Alan Dershowitz...

Une campagne contre Norman Finkelstein

par Bitta Mostofi


Ces dernières semaines, un nombre considérable de choses a été dit et écrit au sujet de la candidature de Norman Finkelstein à l’université DePaul. Comme le savent la plupart des universitaires, il est exceptionnel qu’un recrutement qui est un processus de décision interne à l’université fasse l’objet d’un débat externe mais c’est oublier que le cas Finkelstein est lui-même loin d’être banal. Des forces extérieures à l’université DePaul ont essayé d’influencer le processus de décision pour rejeter la candidature de Finkelstein.

Cette campagne est un modèle du genre d’attaques lancées contre les personalités critiques de la politique du gouvernement israélien pour les réduire au silence. Le but recherché est d’affaiblir la volonté des universitaires, des journalistes, des politiciens ou des individus qui osent critiquer au nom des Droits de l’Homme la politique israélienne en les menaçant de perdre leurs moyens d’existence.

Parlant du cas Finkelstein dans son livre, « La démocratie maintenant », le professeur Avi Shlaim de l’université d’Oxford, expert reconnu du conflit israélo-palestinien a déclaré que : « Israël n’a pas d’immunité contre la critique, il n’a d’immunité morale contre la critique en raison de l’holocauste. Israël est une Etat-nation souverain, il devrait être jugé sur les mêmes critères que n’importe quel autre Etat et Norman Finkelstein est quelqu’un de très sérieux, quelqu’un de bien informé et un critique sévère des pratiques israéliennes d’occupation des territoires et de dépossession des Palestiniens. »

Les qualifications universitaires de Norman Finkelstein plaident pour lui. Il a obtenu son doctorat de l’université de Princeton pour sa thèse sur la théorie du sionisme et il a depuis continué à travailler sur le sujet pour publier un certain nombre d’ouvrages dont « L’industrie de l’holocauste », et « Image et réalité du conflit israélo-palestinien ». Très récemment, Finkelstein a écrit, « au delà de la Chutzpah » (culot absolu ndtr). Ce dernier ouvrage contient une critique acerbe et une remise en cause du livre d’Alan Dershowitiz, « le cas d’Israël ».

Dershowitz a essayé en vain d’empêcher la publication de « au delà de la Chutzpah » en menaçant de faire un procès à son auteur et en demandant au Gouverneur Schwartzenager d’arrêter la publication de son livre. Malgré cela, les Editions de l’université de la Californie ont publié le livre de Finkielstein. Ayant échoué à interdire « Au delà de la Chutzpah », Dershowitz a alors tenté de contrecarrer la carrière universitaire de Finkelstein à l’université de DePaul, pour le réduire au silence.

Dès 2005, Dershowitz a commencé à envoyer au président de l’université ainsi qu’aux autres corps d’enseignants, au personnel administratif et aux étudiants, de longs articles et documents attaquant Finkelstein. Dans un article récent du Wall Street Journal, Dershowitz a déclaré qu’il « a été personnalement invité par l’ancien Président du département de la politique scientifique de l’université DePaul de ‘pointer les exemples les plus flagrants et les plus significatifs de la malhonnêteté intellectuelle de Finkelstein’. » Ce que ne dit pas Dershowitz est que cette demande n’est pas tombée du ciel. Elle est arrivée en juin de 2006, soit une année après que Dershowitz ait pris contact avec le professeur de l’université DePaul qui a écrit la lettre ainsi qu’avec d’autres facultés et avec le Père Holtschneider, Président de l’université DePaul.

Sa lettre était la suivante : « J’ai contacté le professeur Peter Novick au sujet de son acte d’accusation que vous avez cité au Père Holtschneider dans votre lettre du 10 novembre 2005 et dans votre courrier intitulé « McCarthyisme littéraire » que vous m’avez envoyé l’année précédente. »

Cela vaut la peine de noter le paradoxe de Dershowitz qui vient à porter des jugements sur la compétence de Finkelstein en matière de conflit israélo-palestinien alors que lui-même n’est pas reconnu comme expert en la matière. De plus, le comité de la politique scientifique de l’université de DePaul a étudié les accusations faites contre Finkelstein et il a conclu qu’elles n’étaient pas fondées quelque soit le point de vue retenu.

Le département a invité deux universitaires indépendants des universités de Chicago et de Pennsylvanie, choisis pour leur expertise sur le conflit israélo-palestinien pour qu’ils évaluent la compétence universitaire du travail de Finkelstein. Ces deux experts ont conclu que le travail de ce dernier représentait une contribution importante en la matière.

C’est avec tristesse que l’on peut dire que l’interférence de Dershowitz et d’autres personnes a remis en cause l’intégrité du processus de sélection des candidatures aux postes universitaires.

Le processus normal de sélection à l’université de DePaul comprend trois stades : au niveau du département, au niveau de la faculté et au niveau de l’université. Chaque recommandation doit recevoir l’approbation du président de l’université DePaul, le Révérend Holtschneider. Selon les propres critères de l’université DePaul, la candidature d’un professeur est évaluée sur la base de son enseignement, de sa pédagogie et des services rendus à l’université. Si le professeur est jugé bon dans deux des trois critères, notamment dans l’enseignement, alors sa candidatue a toutes les chances d’être retenue.

Dans le cas de Finkelstein le département de la politique scientifique a voté 9 contre 3 en sa faveur et l’université à 5 contre 0 pour l’engager. Le vendredi 13 avril 2007, Finkelstein a reçu du conseil de direction de l’université DePaul, les résultats de l’examen de sa candidature que le président de l’université a dû approuver.

Alors que tous les comptes-rendus étaient en faveur de Finkelstein, le doyen de la faculté DePaul a joint au dossier une lettre en sa défaveur allant à l’encontre de la recommandation de sa propre faculté. Le doyen reconnaît que les étudiants trouvent exceptionnel l’enseignement de Finkelstein et que la direction de la faculté trouve suffisamment remarquable et précieuse sa pédagogie pour que sa candidature soit retenue. Ne trouvant pas de critères légitimes pour s’opposer à la candidature de Finkelstein, le doyen a fait appel au Catholicisme, notamment à la tradition de Saint Vincent de l’université DePaul, créant ainsi de nouvelles bases d’évaluation des candidatures.

Le doyen commence par analyser le manque de consensus sur la candidature de Finkelstein et son absence de respect pour les avis des autres. Jugeant le ton excesssif de la pédagogie de Finkelstein et non le fonds de son enseignement, l’association des professeurs d’université (AAUP) de l’Illinois a publié un rapport intitulé ‘sur la collégialité comme rapport pour l’évaluation du corps enseignant’ qui souligne que « certainement une absence de collégialité doit, par elle-même, ne jamais constituer une base pour rejeter une candidature, mais comme l’a souligné le professeur Kirstein de l’université Saint Xavier, « le ton excessif dans la pédagogie est habituellement une ligne rouge à ne pas dépasser parce qu’il peut détruire la controverse et cela les élites ne l’aiment pas. »

Si nous devons être honnêtes avec ce qui est en jeu ici, nous devons reconnaître, comme je sais que Finkelstein serait le premier à le faire, que ce qu’il éprouve n’est rien comparé à ce qu’éprouvent les Palestiniens dans leur vie quotidienne dans les Territoires occupés ou en exil. Ce qui est important, c’est la capacité pour les Occidentaux de faire une évaluation honnête et juste du conflit israélo-palestinien.

L’année dernière, il y a eu une tentative, qui a échoué, pour évincer Joseph Massad de l’université de Columbia. A partir d’accusations falsifiées, on a voulu faire croire qu’il maltaitait les étudiants de sa classe qui ne partageaient pas son avis. Les professeurs renommés Steven Walt et John Mersheimer ont été mis sur des charbons ardents pour avoir écrit un article sur l’influence négative du lobby sioniste en matière de politique étrangère des USA.

Malgré les attaques des médias, le livre de Jimmy Carter, « Paix et non Apartheid », est devenu un best-seller. Toute ceci semble montrer que la vérité fait son chemin dans le public et qu’elle finira peut-être par détruire le tissu des mensonges qui permet à Israël de continuer ses politiques actuelles.

L’immense effort pour réduire au silence Finkelstein semble prendre racine dans le fait que ce dernier a basé toute sa carrière au service de la vérité, risquant ses moyens d’existence et une chose qu’il aime passionnément, l’enseignement. Dans un entretien publié dans « La démocratie maintenant », Raul Hillberg, un universitaire reconnu comme ayant mis en place les études sur l’holocauste, dit avec beaucoup d’émotion : « Cela demande beaucoup de courage pour un universitaire de dire la vérité quand personne à l’extérieur ne le soutient ; aussi je dois dire que sa place dans toute l’histoire de la recherche historique est garantie et il sera parmi ceux qui ont triomphé même si le coût est élevé. »

L’association AAUP de l’Illinois, analysant le cas Finkielstein, déclare : « Nous soumettons avec respect ce rapport pour exprimer notre conviction que la protection la plus sûre de l’excellence universitaire est la liberté d’expression à l’université. » Les efforts sans scrupule de Dershowitz et d’autres personnes pour étouffer cette liberté sont le signe non de leur puissance mais en fait de leurs craintes à voir la vérité sortir au grand jour. En tant qu’élève de DePaul, j’ai connu DePaul intimement. Je sais que l’institution et ses étudiants sont assez forts pour assumer cette liberté d’expression à l’université à condition que cette dernière puisse avoir le courage de la laisser s’exprimer.

Que l’université DePaul résiste à la pression ou non, le travail de Finkelstein continuera sur sa voie et son intégrité et c’est à nous de refuser la tentation de la censure.


Bitta Mostofi est membre de l’équipe éditoriale d’Electronic sur l’Irak et une activiste de longue date des droits de l’homme. Bitta a obtenu son baccalauréat et un doctorat en droit à l’université DePaul, à Chicago. Elle travaille actuellement en tant qu’avocate de droits civiques au Conseil sur des relations américano-islamiques à Chicago.



Les Amis duMonde diplomatique

Les éditions Aden, de Bruxelles, viennent de publier "Mythes et réalité du conflit israélo-palestinien", traduction en français d’un ouvrage de l’historien et chercheur américain Norman Finkelstein,.

« Voici un livre à ne pas manquer, avait écrit Le Monde diplomatique lors de la parution originale en anglais. L’histoire du conflit israélo-arabe a donné lieu à une multitude d’ouvrages, mais Image and reality of the Israel-Palestine conflict tranche sur l’essentiel de cette production. Par sa radicalité : Norman Finkelstein prend sans concession le contre-pied de l’interprétation dominante de plusieurs moments clés (1948, 1967, 1973). Par son caractère pointu : l’auteur passe au crible d’une méthodologie rigoureuse les thèses de certains chercheurs. Par son goût pour la polémique : il n’hésite pas à qualifier de tronquée une citation déformée, d’imaginaire un fait ou un chiffre inventé, bref à traquer comme telle toute manipulation, toute falsification ".

« Le livre que vous allez lire a ceci de commun avec les grands crus bourguignons ou bordelais qu’il s’est bonifié avec les années, écrit Dominique Vidal dans la longue préface très argumentée de l’édition française. Le plaisir intellectuel éprouvé à sa première lecture, en 1995, je l’ai retrouvé, plus vif encore, en le relisant plus de dix ans après, poursuit-il. Peu d’œuvres, de surcroît, n’ont rien à craindre de l’épreuve du temps - surtout s’agissant du Proche-Orient. En voici une, assurément.

« Il est arrivé qu ‘on attribue à Norman Finkelstein un goût immodéré pour le pamphlet, écrit encore Dominique Vidal. L’auteur de ces lignes lui a d’ailleurs reproché à propos d’un autre livre quelques jugements à l’emporte-pièce. Reconnaissons néanmoins que, le plus souvent, les contestations prétendument méthodologiques dissimulaient purement et simplement une hostilité idéologique irréductible. Car les inconditionnels d’Israël vouent à ce chercheur américain radical une haine tenace, comme à tant d’intellectuels, surtout juifs, qui dénoncent l’occupation israélienne des territoires palestiniens et refusent de céder à leur chantage à l’antisémitisme.

Que Norman Finkelstein soit un polémiste brillant, le lecteur le vérifiera sans mal ici. Mais il mesurera aussi que ce don ne porte pas atteinte au sérieux, à la probité et à l’efficacité de sa démarche. Plus : d’une décennie après, " Image and reality of the Israel-Palestine conflict " apparaît presque visionnaire... ».

Norman Finkelstein est né à Brooklyn en 1953 de parents qui avaient survécu aux camps de concentration nazis. Il a soutenu sa thèse de doctorat à Princeton sur la théorie du sionisme. Il est l’auteur de nombreux ouvrages dont " L’industrie de l’holocauste " (La Fabrique 2001) et " Tuer l’espoir " (Aden, 2003).

Sources Info Palestine

Posté par Adriana Evangelizt

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